search-form-close
Air Algérie, DEMS : les aberrations de la bureaucratie algérienne

Air Algérie, DEMS : les aberrations de la bureaucratie algérienne

C’est à peine croyable, mais cela relève bien de la triste réalité. Au moment où des milliers d’Algériens sont bloqués à l’étranger depuis le début de la pandémie de Covid-19 et sont prêts à tout donner pour pouvoir regagner leurs foyers, des avions d’Air Algérie, mobilisés pour les besoins de l’opération de rapatriement, se permettent de rentrer avec des sièges vides.

C’est un parlementaire qui dénonce l’aberration. Noureddine Belmeddah, député de la communauté nationale établie à l’étranger, en a fait part au Premier ministre.

« Un processus compliqué et long et pas pratique qui a conduit à des situations où des avions d’Air Algérie rentrent à Alger avec un nombre considérable de sièges vides, bien que la demande soit importante », écrit-il dans une lettre à Abdelaziz Djerad.

Le député a bien mis le doigt sur la source du problème. « Un processus compliqué,  long et pas pratique ». Autrement dit, le sempiternel problème des tracasseries et lenteurs bureaucratiques qui, hélas, ne se limitent pas à cette opération conjoncturelle.

Rentrer au pays quand on est en voyage à l’étranger, même en temps de crise sanitaire et de suspension des liaisons aériennes, devait relever de la simple formalité tant que des vols de rapatriement sont organisés.

S’inscrire sur une liste au niveau du consulat ou du bureau de liaison de la compagnie aérienne, payer son billet, présenter un document de voyage valide et accessoirement les résultats d’un test PCR, c’est à cela qu’aurait dû raisonnablement se limiter la procédure.

Or, les choses sont bien plus compliquées, selon le même député qui dénonce « un circuit tentaculaire » : introduire des demandes d’autorisation de retour au niveau des consulats qui les transmettent au ministère des Affaires étrangères à Alger et qui, à son tour, les transmet au ministère de l’Intérieur auquel revient le dernier mot.

Vols de rapatriement d’Air Algérie : l’établissement des listes pose problème

Autrement dit, c’est à ce niveau qu’on décide qu’un prétendant ouvre-droit ou non au rapatriement suivant les critères établis. S’il est compréhensible qu’une telle procédure soit mise en place à cause de tentatives d’infiltration d’éléments qui ne feraient pas partie de la catégorie de citoyens dont le retour est absolument nécessaire, il est inacceptable que des avions rentrent avec des sièges vides au moment où des Algériens piégés à l’étranger par la pandémie vivent dans des conditions difficiles, risquent de perdre leur emploi où leurs études et restent éloignés de leurs familles pendant de longs mois.

Un fléau qui freine la marche du pays

Cette complication d’une opération pourtant simple par la multiplication des intervenants et des étapes bureaucratiques n’est pas propre au rapatriement.

La bureaucratie est un fléau qui freine tout le pays dans sa marche, cela de l’aveu même des différents gouvernements qui se succèdent et qui, tous, ont fait de la lutte contre le phénomène une priorité, sans que les choses changent sensiblement.

Que l’on soit opérateur économique, étudiant ou simple citoyen, on est confronté quotidiennement aux embûches, parfois aberrantes, de la machine bureaucratique.

Il ne s’agit pas de nier que des avancées ont été effectuées grâce à la numérisation, comme la possibilité de se faire délivrer à distance certains documents d’état civil, de justice ou autres, mais quand on exige une photocopie légalisée pour une carte d’identité censée être biométrique, il n’est pas exagéré de parler d’aberration.

Ou encore quand un postulant à un recrutement est tenu de fournir un tas de paperasse qui lui coûte du temps et de l’argent, ainsi qu’à l’administration, alors que son diplôme peut suffire pour passer le concours et compléter son dossier s’il est retenu.

Examen DEMS : un nouveau dossier administratif à fournir

La bureaucratie touche tous les secteurs. Aucun n’est épargné. Les responsables algériens aiment la paperasse. Dans la santé, des résidents en médecine ont dû fournir un dossier administratif (certificat de résidence et extrait de l’acte de naissance) pour passer l’examen de DEMS alors qu’ils poursuivent leurs études de médecine depuis des années.

Logiquement, l’administration a les dossiers de tous les étudiants et résidents en médecine, pourquoi en demander un nouveau dossier pour l’examen DEMS ? Une carte d’identité aurait suffi largement aux résidents, qui étaient obligés de courir d’administration en administration pour constituer un nouveau dossier administratif, au lieu de se préparer à leur examen, dans la sérénité.

A l’administration des Impôts, les aberrations ne manquent pas non plus. Comme par exemple demander de légaliser à la mairie un document établi par le responsable d’une entreprise qui a pignon sur rue.

La bureaucratie tatillonne à l’algérienne ne constitue pas seulement une source de stress et de préoccupation pour les citoyens, elle a un coût économique colossal. Les retards de l’administration algérienne obligent les citoyens à perdre un temps précieux pour constituer des dossiers administratifs, souvent inutiles, et les entreprises à recruter spécialement des agents pour s’occuper des démarches administratives, sans compter l’énorme consommation de papier destiné à l’impression, et qui est importé en devises fortes.

Et bien sûr qui dit bureaucratie, dit corruption et favoritisme, des fléaux qui ravagent la société algérienne. Devant les tribunaux, beaucoup d’affaires de corruption sont jugées quotidiennement et, dans bien des cas, le recours à ce procédé délictuel naît des entraves bureaucratiques qui se dressent devant les opérateurs.

L’Algérie gagnerait à faire de la lutte contre la bureaucratie une priorité pour faciliter la vie à ses citoyens et favoriser la relance de l’économie par l’investissement productif. C’est surtout un moyen efficace pour lutter en amont contre la corruption dont on parle tant.

  • Les derniers articles

close