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BAC 2025 en Algérie : un texte de Benjamin Stora suscite la controverse

BAC 2025 en Algérie : un texte de Benjamin Stora suscite la controverse

Source : capture d'écran YouTube
Benjamin Stora

Un texte de l’historien Benjamin Stora a servi de sujet pour l’épreuve de langue française du Bac 2025 en Algérie. Des voix se sont vite élevées pour contester ce choix. Stora se dit « touché » et dénonce une « agressivité ».

Habitué des attaques de l’extrême-droite en France pour ses travaux sur la brutalité de la conquête coloniale de l’Algérie, l’historien Benjamin Stora ne s’attendait sans doute pas à se retrouver au cœur d’une polémique en Algérie, à propos de la même question.

Le texte est tiré du livre « Algérie 1954 : une chute au ralenti », publié par Benjamin Stora en 2011. Il traite de la conquête coloniale de l’Algérie et spécifiquement de la formation de la propriété coloniale ou, en d’autres termes, la dépossession des Algériens de leurs terres agricoles pour les offrir aux colons.

L’historien algérien Hosni Kitouni a réagi dans l’urgence via un post sur les réseaux sociaux, promettant de revenir « plus longuement et point par point sur l’argumentaire de B. Stora ».

L’historien Hosni Kitouni en colère

Dénonçant « un texte scandaleux au Bac », Kitouni a crié sa « stupéfaction » devant ce qu’il qualifie de « très malheureuse initiative » qui « ne rend pas justice aux victimes de la colonisation et à la vérité historique ».

« Comment, en 2025, peut-on donner à nos futurs étudiants un texte qui défile de bout en bout le narratif colonial le plus inepte, chargé de controverses et factuellement faux », s’est-il interrogé.

Pour l’historien algérien, le choix est « si peu judicieux » et « si on a voulu rendre service à M. Stora, ce n’est certainement pas par un texte si peu à son avantage. »

Il reproche à l’historien français d’avoir soutenu, dans le texte qui a servi de sujet du Bac, qu’il n’existait pas en Algérie de « propriété privée de la terre avant 1830 », et que « la colonisation a lié son avenir économique à l’agriculture » alors qu’elle a lié son sort à « l’exploitation du travail des Algériens ».

Benjamin Stora répond à une polémique qui le cible en Algérie

Le plus « renversant », selon Kitouni, est que l’auteur ne dit pas un mot sur le « Séquestre », par le biais duquel « s’est constitué le 4/5 des 6 millions d’hectares pris aux Algériens », et sur la spéculation sur la terre à laquelle se sont adonnés les colons européens.

« On n’a pas le droit à la légèreté avec la souffrance qui fut celle des victimes », ajoute l’historien algérien qui estime que « le problème de M. Stora et des historiens français avec la question de la terre est très simple : il renvoie à l’origine du peuplement colonial et à son rôle dans la formation de la société coloniale ».

Benjamin Stora : « J’ai tant d’adversaires en France »

Contacté par TSA, Benjamin Stora avoue d’emblée qu’il est touché par l’ « agressivité » qui le vise. « Je suis très touché. Mon travail peut servir pour les jeunes générations », réagit-il d’abord après avoir appris que le sujet du Bac était extrait de l’un de ses livres. Sur les critiques de Hosni Kitouni, il a souligné qu’il a travaillé sur la colonisation de peuplement et la dépossession foncière, un sujet qu’il a traité dans son premier livre paru il y a 50 ans, qui est une biographie de Messali Hadj, et dans un autre ouvrage, « La guerre d’Algérie vue par les Algériens », édité en 2011.

« Pourquoi une telle agressivité alors qu’une discussion académique sur ces sujets peut être menée tranquillement ? », s’interroge-t-il.

« J’ai tant d’adversaires en France nostalgiques de l’Algérie française qu’il est préférable de mener le débat dans la courtoisie », insiste-t-il.

Benjamin Stora est, en effet, attaqué régulièrement en France par les nostalgiques de l’Algérie française pour ses travaux sur la colonisation de l’Algérie. Auteur d’un rapport sur « la mémoire de la colonisation » remis en 2021 au président Emmanuel Macron, il est aussi le chef de file du panel français de la commission mixte d’historiens mise en place par l’Algérie et la France début 2023.

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