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Covid-19 : « Nous avons constaté une augmentation des formes graves »

Covid-19 : « Nous avons constaté une augmentation des formes graves »

L’Algérie fait face à rebond de l’épidémie de coronavirus. Le CHU de Sétif fait face à une recrudescence inquiétante des formes graves du Covid notamment chez les jeunes, selon le chef du service de réanimation dans cet hôpital, le Pr Nabil Mosbah. Il appelle la population à revenir aux mesures barrières. Entretien.

Comment se présente la situation épidémiologique à Sétif ?

Après une accalmie, surtout à la mi-avril, où il y a eu vraiment une nette diminution des cas de Covid-19 et notamment des cas graves- nous avons même passé une semaine sans malade Covid- vers la dernière semaine d’avril il y a quand même eu une augmentation très importante des formes graves aux urgences et aux services Covid.

A la fin de la 2e vague, certains services ont fermé comme la pneumo-phtisiologie et la médecine interne, mais la dernière semaine du mois d’avril on a été obligé de rouvrir, et nous avons aussi constaté une augmentation de formes graves du Covid-19.

Comment se présentent ces formes graves ?

Ce sont généralement des malades (dont l’état) nécessite le recours à la ventilation artificielle y compris par l’intubation.

Avez-vous enregistré des décès ?

Cela fait une semaine, en réanimation nous avons enregistré deux décès et il y’en a eu aussi dans les autres services (urgences médicales, médecine interne, pneumologie).

Des spécialistes disent qu’il y a de plus en plus de jeunes malades atteints du Covid-19. Avez-vous aussi constaté ce phénomène à Sétif ?

Oui, c’est le cas à Sétif. Comme je vous l’ai dit, durant la dernière semaine d’avril, on a été obligé d’admettre en un week-end cinq malades dont deux étaient jeunes, dont un était âgé de 22 ans et sans antécédents.

Son tableau clinique était beaucoup plus digestif, cela a commencé par des diarrhées et des vomissements, puis une altération de son état de conscience. On nous a appelés pour le transférer comme un malade non-Covid mais chez nous en réanimation médicale on a demandé la PCR et le scanner qui se sont révélés en faveur du Covid. Toute cette symptomatologie était une complication thromboembolique avec un AVC ischémique très important.

L’Algérie est-elle en train de vivre une troisième vague de l’épidémie ?    

Pour nous à Sétif, oui. Parce qu’on a passé presque une semaine avec zéro malade en réanimation. De plus, il n’y avait pas de formes graves durant le mois de mars.

En février, on en a enregistré seulement 1 à 2 malades en réanimation, et d’un seul coup il y a une augmentation importante et une recrudescence des formes graves.

Après le zéro malade et que subitement vous avez 4 à 5 malades en réanimation et d’autres qui attendent leur transfert en réanimation ou vers les services Covid, je pense que c’est possible qu’il s’agisse d’une 3e vague.

Quelles sont les mesures prises pour faire face à cette recrudescence à Sétif ?

Après l’augmentation des cas, on a été obligé de rouvrir le service pneumo, une fois celui-ci saturée on a rouvert la semaine passée le service de médecine interne qui a commencé à recevoir des patients Covid.

Apparemment, cela a donné des résultats. Actuellement, il n’y a pas beaucoup de malades aux urgences médicales qui attendent et j’espère que le nombre va encore diminuer.

Faut-il revenir au confinement ?

Pas à 100% parce que notre population a déjà beaucoup souffert de ce confinement pendant presque toute l’année 2020.

Je pense qu’il faut insister sur le renforcement des moyens de protection, parce que nous constatons un relâchement et un non-respect des mesures barrières.

Je pense que c’est la première cause (de la recrudescence), surtout avec le mois de Ramadan et les regroupements dans les marchés, etc.

Il faut insister sur la distanciation physique, le port du masque et l’hygiène des mains… Ce sont les moyens les plus efficaces, nos concitoyens ne peuvent pas supporter un autre confinement après celui qui a duré une année.

Après plus d’une année de bataille contre la pandémie de Covid-19, la mobilisation des personnels soignants est-elle toujours intacte ? 

En tant que personnel médical, on a vraiment souffert. On est épuisé physiquement et moralement. Les conditions ne sont pas les mêmes, on est fatigué.

Et nous comptons sur l’aide de nos concitoyens plus qu’autre chose. A titre d’exemple, pendant la 1ère vague, au CHU de Sétif les 14 lits de réanimation furent dédiés  au Covid.

On a créé une unité pour les malades non-Covid, mais à partir de la 2e et 3e vague on n’a pas pu le faire à cause du manque de personnel notamment le paramédical spécialisé qui peut prendre en charge les malades en réanimation.

Disposez-vous d’assez de moyens de protection anti-Covid ?

Oui, par rapport à la 1ère et la 2e vague durant lesquelles nous avions souffert d’un manque terrible, je pense qu’on a actuellement suffisamment de moyens de protection (blouses, masques).

Le vaccin est-il disponible pour les personnels soignants ?

Non. Je crois qu’il n’y a même pas une centaine de personnels médicaux et paramédicaux qui ont été vaccinés. Il y a eu une première vague de vaccination avec le vaccin russe Spoutnik V, et vu la quantité insuffisante, le personnel médical et paramédical n’a pas pu bénéficier d’un vaccin.

Par la suite, on a reçu le vaccin chinois mais un grand nombre de personnels de la santé attendent leur tour pour se faire vacciner.

Vous lancez un appel pour avoir plus de doses à Sétif ?

Bien sûr, Sétif est la deuxième ville d’Algérie en nombre de population, après Alger. On n’a pas les moyens pour faire vraiment endiguer cette pandémie.

On a deux solutions : renforcer les moyens de protection et vacciner le maximum de personnels de la santé et également de la population.

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