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Faut-il négocier avec les oligarques emprisonnés ? La polémique rebondit

Faut-il négocier avec les oligarques emprisonnés ? La polémique rebondit

La chute du président Abdelaziz Bouteflika qui a été emporté par le Hirak du 22 février 2019 a entrainé celle d’une caste d’hommes d’affaires réputés proches de celui qui a régné pendant 20 ans sur l’Algérie, de 1999 à 2019.

De nombreux hommes d’affaires comme Ali Haddad, les frères Kouninef, Ahmed Mazouz, les frères Tahkout d’autres ont été arrêtés et condamnés à de lourdes peines de prison. Les biens de certaines ex-figures du régime de Bouteflika ont été saisis par la justice, mais leur récupération risque de prendre du temps, notamment les fonds détournés vers l’étranger.

Fin avril, un débat a été lancé par le président du Front el Mostakbel Abdelaziz Belaid, qui a proposé de négocier et surtout une réconciliation avec les oligarques. Avec la campagne électorale pour les législatives du 12 juin, la polémique a rebondi.

« Je suis pour négocier »

Ce dimanche 6 juin, le même Abdelaziz Belaid, et Soufiane Djilali, président de Jil Jadid ont abordé le sujet pour étaler leurs divergences. Le premier est revenu à la charge en proposant de négocier avec les hommes d’affaires emprisonnés.

« Je suis pour négocier et récupérer de l’argent pour le pays. Les fonds qui sont à l’étranger je les rapatrie et je laisse circuler l’argent disponible dans le pays », a plaidé Abdelaziz Belaïd lors d’une conférence de presse.

Abdelaziz Belaid appelle cela de l’« intelligence moderne ». « Mon raisonnement est avant tout économique, et ensuite politique », a justifié Belaid pour qui cette façon permet de redonner de la confiance aux investisseurs nationaux et étrangers.

« Les investisseurs étrangers lisaient dans les médias algériens que ces hommes d’affaires étaient considérés comme des champions économiques. Ils ont été couronnés comme de bons managers (…) et sont aujourd’hui en prison, qui aura confiance ? », a expliqué le chef du Front el Moustakbel qui plaide une nouvelle pour une « réconciliation » avec ces hommes d’affaires emprisonnés.

« C’est d’abord une réconciliation économique et politique en second lieu» qui permettra « de retrouver la confiance », a appuyé Belaid.

« Il est de l’ordre de l’impossible que l’économie (algérienne) redécolle dans ce climat de peur, de terreur et de ces lois coercitives qui dissuadent jusqu’à nos cadres, a-t-il mis en garde. Un wali rechigne à signer (…) tout le monde a levé le « frein à main » comme on, dit ».

« Ces gens méritent la prison »

À rebours du raisonnement du président du Front El Moustakbal, Soufiane Djilali, le président de Jil Jadid, s’oppose catégoriquement à tout élargissement des oligarques en prison. Ce dimanche à l’occasion d’une conférence de presse, M. Djilali a jugé « immoral » le fait de négocier avec les hommes d’affaires emprisonnés.

Pour le président de Jil Jadid, les hommes d’affaires jugés et condamnés pour corruption « méritent leur sort » même s’il reconnaît qu’ils ont agi dans « l’intérêt de parties tierces ». Il les qualifie de « couverture » ayant « servi de tremplin à des personnes qui se sont enrichies en utilisant leurs noms ».

« Ces gens méritent la prison », car « ils ont volé pour eux et au profit des personnes qui étaient derrière eux », a asséné Djilali. « Je connais certains de ces oligarques qui ne savent même pas remplir leurs chèques », a-t-il lancé pour souligner les limites intellectuelles de personnages qui « se sont mis la loi de leur côté pour piller les deniers du peuple ».

Voulant tourner la page du règne de Bouteflika, Djilali Soufiane appelle à donner la chance aux entrepreneurs qui sont capables de bâtir une vraie économie. Le chef de Jil Jadid  demande la poursuite la campagne de récupération des fonds dilapidés par les « oligarques » tout en excluant toute possibilité de négociation avec eux.

« Les gens qui ont pillé le pays doivent être jugés. Pourquoi quelqu’un qui vole un kilo de pommes de terre est emprisonné, alors qu’un autre qui a dilapidé des milliards on se dit on va le libérer et on négocie avec lui ? », s’interroge Soufiane Djilali qui en fait une question éthique et morale.

« Le problème de notre pays c’est la dimension morale. Un État se construit sur des principes. Et non pas sur les compromis et la participation au crime », a-t-il soutenu. Pour lui, il n’est pas question de marchander les principes qui font le fondement de l’État.

Le chef de l’État Abdelmadjid Tebboune a fait de la lutte contre la corruption et particulièrement de la question de la récupération de l’argent détourné par les oligarques un des principaux thèmes de sa campagne présidentielle de 2019.

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