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France : deux crimes islamophobes en un mois, le Maghreb s’inquiète

France : deux crimes islamophobes en un mois, le Maghreb s’inquiète

Lorsque, le 27 avril dernier, les musulmans de France ont marché pour dénoncer l’assassinat deux jours plus tôt d’un des leurs dans une mosquée du Gard, beaucoup s’étaient demandé « qui sera le prochain ». Le suivant, c’est donc un Tunisien, tué par son voisin motivé par le racisme.

En un peu plus d’un mois, deux crimes islamophobes ont été perpétrés en France. Le 25 avril, Aboubakar Cissé, un malien de 22 ans, est égorgé alors qu’il priait dans une mosquée du Gard (sud). Samedi 31 mai, un Tunisien, Hicham Miraoui, est tué par balles dans le Var par son voisin, qui a également blessé un ressortissant turc dans l’attaque. Ce n’est pas une querelle de voisinage qui a mal tourné, mais bel et bien un crime raciste et islamophobe.

France : deux crimes islamophobes en un mois

La peur exprimée par les musulmans de France au lendemain de l’assassinat d’Aboubakar Cissé n’était pas infondée. Le meurtre sonnait en effet le passage à l’acte de la mouvance extrémiste française après des années de libération de la parole raciste et de stigmatisations, ciblant essentiellement les musulmans. La question qui se pose maintenant est : jusqu’où ira-t-elle ?

« Quand une partie de la classe politique et des médias font des étrangers, des musulmans, le problème majeur en France, le risque est grand de voir des individus passer violemment à l’acte pour ‘’régler le problème’, à leur façon », a dénoncé sur X un avocat, Rafik Chekkat, au lendemain de l’assassinat du ressortissant tunisien.

Pour SOS racisme, il s’agit du « résultat d’un travail minutieux mené par le camp du racisme et visant à rendre légitime l’expression du racisme en mots et en actes ».

Les deux crimes portent en effet le sceau du racisme et de l’islamophobie. Ils ont été tous les deux suivis de vidéos diffusées sur les réseaux sociaux par leurs auteurs. Les meurtriers ont été motivés par la haine et ont agi par conviction.

La Tunisie appelle la France à protéger les ressortissants tunisiens

Au-delà de la communauté musulmane de France, le crime a choqué en Tunisie et dans tout le Maghreb. La communauté maghrébine est à la fois l’otage des désaccords politiques entre les gouvernements et des ambitions électorales du courant extrémiste. C’est aussi l’image de la France de l’autre côté de la Méditerranée, et plus globalement dans le monde musulman, qui en prend un sérieux coup.

Le gouvernement tunisien a vivement condamné cet « acte ignoble » et a appelé à garantir la sécurité de la communauté tunisienne en France. Lors d’un entretien téléphonique avec son homologue français Bruno Retailleau, le ministre tunisien de l’Intérieur, Khaled Nouri, a souligné que « les discours de haine et les appels à l’intolérance, qui constituent souvent un terreau favorable à ce type de violences barbares ».

Retailleau a assuré à son vis-à-vis que « ce criminel ne représente ni la société française, ni les valeurs de la République ». « Le racisme doit être sévèrement puni. Quand il conduit à cette sauvagerie, la réponse pénale doit être implacable », avait-t-il déjà soutenu la veille à l’issue d’un entretien avec l’ambassadeur de Tunisie.

Retailleau est-il toutefois sincère quand il a réaffirmé à son interlocuteur tunisien « le rejet total par les autorités françaises de tout discours ou comportement susceptible de semer la division au sein de la société » ?

Le ministre de l’Intérieur, devenu président des Républicains grâce, l’accuse-t-on, à ses attaques contre l’Algérie, l’immigration et les musulmans, est lui-même un de ceux qui ont contribué à banaliser le discours islamophobe par ses prises de position publiques controversées. Son « à bas le voile », prononcé fin mars lors d’un rassemblement « contre l’islamisme », n’est pas le genre de propos qui apaise ou qui ne sème pas « la division au sein de la société ». Émanant d’un ministre en charge également du culte, c’est une légitimation politique de l’islamophobie.

La surenchère autour de l’islam, des musulmans et des Maghrébins, sous couvert de lutte contre l’islamisme politique et la radicalisation, a fini par créer un climat irrespirable pour la communauté musulmane de France, composée majoritairement de Français à part entière. Ce n’est plus l’immigré, ou l’étranger, qui est pointé du doigt, mais une frange entière de la société. Le danger pour la France d’une glissade dramatique est réel.

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