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L’Espagne à l’épreuve de la versatilité du Maroc

L’Espagne à l’épreuve de la versatilité du Maroc

Le changement de position de l’Espagne dans le dossier du Sahara occidental s’est fait en catimini. Beaucoup ne comprennent pas que ce soit le roi du Maroc qui rende publique une telle décision qui, en principe, relève de la souveraineté espagnole.

L’affaire commence à faire débat en Espagne, tandis que des voix mettent en garde sur le manque de sincérité du Maroc.

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Le parti socialiste (PSOE), au pouvoir, a tenté un exercice d’explication envers ses membres à travers un document interne. La teneur du document laisse penser que c’est les enclaves de Ceuta et Melilla ainsi que le contrôle des flux migratoires en provenance du Maroc qui ont été mis dans la balance.

« Inaugurer de nouvelles relations solides et stables avec un pays voisin et partenaire stratégique comme le Maroc, est indispensables pour l’intégrité territoriale, y compris Ceuta et Melilla, à la souveraineté de l’Espagne, et à la stabilité, la sécurité et la prospérité des deux pays », y est-il écrit.

Plus explicite, le PSOE, qui qualifie la dernière brouille avec son voisin de « pire crise avec le Maroc depuis des décennies », indique que ces nouvelles relations avec le royaume « permettent de renforcer la sécurité des frontières de Ceuta et Melilla et des frontières maritimes des îles Canaries pour assurer le contrôle des flux migratoires et la lutte contre la traite des êtres humains et garantir la coopération en matière de lutte anti-terroriste ».

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Le parti socialiste prétend aussi qu’il n’y a pas de revirement dans la position de l’Espagne qui « s’inscrit dans le cadre des Nations Unies et des résolutions du Conseil de sécurité », et qui est la même « depuis 2008, avec José Luis Rodríguez Zapatero comme président du gouvernement », rappelant que dans les déclarations des réunions de haut niveau Espagne – Maroc de 2008, 2012 et 2015 il est expressément mentionné que « l’Espagne salue les efforts sérieux et crédibles du Maroc ».

« Nous restons dans la lignée de la position espagnole au sein du cadre des Nations Unies pour parvenir à une solution mutuellement acceptable », insiste le PSOE.

Pour l’Algérie, le document lui consacre une ligne, la qualifiant de « partenaire stratégique pour l’Espagne et pour l’Union européenne et a toujours été un fournisseur de gaz très fiable ».

Un vent de contestation

Face aux reproches sur cette manière d’agir en catimini, puisque les autres groupes politiques espagnols n’ont pas été consultés, le parti au pouvoir explique que « la diplomatie demande du temps et beaucoup de discrétion pour obtenir des résultats ».

Les critiques commencent à fuser en Espagne. « Nous demandons à connaître la lettre de Sanchez Castejon au roi Mohammed VI du Maroc. Nous ne connaissons que des extraits de la déclaration proprement dite. Nous ne pouvons pas apprendre un changement de position aussi important en Espagne à travers une déclaration de Mohamed VI », a tweeté le journaliste spécialiste du Maghreb et du Sahara occidental, Ignacio Cembrero.

En Algérie, le changement radical de la position de l’Espagne sur le Sahara occidental ne passe pas. Alger a aussitôt rappelé son ambassadeur à Madrid et le flot des critiques continu de couler. L’Espagne est désormais confrontée à la versatilité du Maroc dont l’Algérie en connaît quelque chose.

« Afin de calmer les forces politiques qui se sont soulevées contre la volte-face du gouvernement de Pedro Sanchez en exigeant des explications au niveau du Parlement, le gouvernement espagnol va essayer de vendre de la rhétorique creuse en soulignant notamment que l’Espagne continue de soutenir que la solution au conflit du Sahara occidental doit être mutuellement acceptée (sans préciser par les deux parties) et qu’elle doit s’inscrire dans le cadre des Nations Unies en tenant compte de ses résolutions », indique un ancien diplomate algérien, contacté par TSA.

« Avec de telles formulations évasives et des pirouettes inconséquentes, Sanchez pense pouvoir camoufler le vil marchandage négocié avec la force d’occupation marocaine par une feuille de vigne alors que la triste réalité est aveuglante : il a troqué le Sahara occidental contre les deux enclaves de Ceuta et Melilla et l’assurance qu’il n’y aura plus de vagues de migrants clandestins. C’est ce vil marchandage que nous avions fermement dénoncé », ajoute-t-il.

Mais pour cet ancien diplomate algérien, l’Espagne fait fausse route en pensant que le régime marocain tiendra ses engagements.

« La partie espagnole se fait des illusions car tôt ou tard, le makhzen, retors et versatile, reniera, comme toujours, ses ‘engagements’ et l’Algérie en sait quelque chose. Il en sera immanquablement ainsi, car dans la doctrine marocaine, ces deux enclaves sont une ‘cause nationale’, tout comme le Sahara occidental, comme le martelait, encore récemment, l’ancien ministre marocain des Affaires étrangères, El Othmani. Le respect de ‘l’intégrité territoriale’ fantasmée par le gouvernement espagnol qui a cédé honteusement face au chantage, finira par se fracasser sous les coups de boutoir du makhzen institutionnel », assure l’ancien diplomate algérien.

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