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Liberté de la presse en Algérie : les messages de Tebboune

Liberté de la presse en Algérie : les messages de Tebboune

À l’instar des autres pays de la planète, l’Algérie a célébré la journée mondiale de la liberté de la presse, coïncidant avec le 3 mai de chaque année, dans un contexte difficile pour les médias.

Alors que l’état de la liberté de la presse dans le pays est jugé en net recul, avec notamment des journalistes qui sont passés par la case prison ou qui y sont toujours, plusieurs faits ayant émaillé la célébration de cette journée permettent d’entrevoir une possible prochaine ouverture.

Cette journée internationale a été célébrée par les autorités officielles, le président de la République en tête. Une première en Algérie. Depuis dix ans, c’est la journée nationale de la presse, le 28 octobre, qui était fêtée avec faste par les officiels.

La journée a été instituée en 2013 par l’ancien président de la République Abdelaziz Bouteflika comme un pied-de-nez aux ONG trop regardantes sur l’état des libertés dans le pays.

Cette année, Abdelmadjid Tebboune a rencontré la corporation au Centre international des conférences (CIC), dans une ambiance détendue, en présence de professionnels qu’on ne peut pas dire « triés sur le volet ».

Le plus emblématique est le journaliste Khaled Drareni, incarcéré entre mars 2020 et février 2021. Le représentant de RSF en Algérie et dans d’autres pays de la région a été arrêté alors qu’il couvrait une marche du Hirak à Alger et poursuivi pour « incitation à attroupement non armé et atteinte à l’intégrité du territoire national ».

Il a été condamné à trois ans de prison ferme, puis à deux ans en appel, avant de voir sa peine réduite après cassation à six mois de prison avec sursis. Il est même arrivé au président de le fustiger publiquement dans une de ses sorties télévisées.

Suscitant un immense élan de soutien tant en Algérie qu’à l’étranger, Khaled Drareni est devenu ces trois dernières années l’un des symboles de la lutte des journalistes algériens pour une liberté de la presse véritable et pour lever les restrictions sur les médias.

Crédit : Présidence de la République

Sa présence à la cérémonie du 3 mai est doublement significative, puisqu’il y a été convié en sa qualité de représentant pour le Maghreb de Reporters sans frontières (RSF), une ONG, comme beaucoup d’autres, pas toujours vue d’un bon œil des autorités algériennes.

Le fait est inédit pour ne pas être signalé. « C’est la première fois que RSF est représentée à ce genre de rencontre alors que les autorités ont toujours critiqué violemment RSF. J’espère que la suite sera positive », a indiqué Khaled Drareni sur les réseaux sociaux.

Médias : Tebboune exprime sa volonté d’ouvrir une « nouvelle page »

Le président de la République a aussi usé d’un ton nouveau dans sa discussion à bâtons rompus avec des représentants des médias publics et privés, dont TSA, où toutes les questions ont été posées, sans briefing ou sélection préalable.

Il a estimé que la place de l’Algérie dans le classement RSF 2023 ne reflétait pas la réalité de la liberté de la presse dans le pays, en affirmant que seuls les classements faits par l’ONU étaient valables.

Abdelmadjid Tebboune a convié la corporation à se prendre en charge et à s’organiser pour se doter d’un syndicat « fort » et d’un conseil d’éthique et de déontologie. Il a réitéré la nécessité pour l’Algérie de disposer d’une « presse forte » et a exprimé sa volonté d’ouvrir une « nouvelle page ».

Khaled Drareni a décrit un président « à l’écoute » et qui n’a pas été « violent » quand il a évoqué avec lui le cas du journaliste emprisonné Ihsane El Kadi.

Crédit : Présidence de la République

Le directeur des sites électroniques Maghreb Emergent et Radio M purge une peine de cinq ans de prison, dont trois mois fermes. Il est incarcéré à la prison d’El Harrach depuis fin décembre dernier et l’entreprise éditrice de ses deux médias a fait l’objet d’un arrêt de dissolution. Son procès en appel est prévu pour le 21 du mois en cours.

Khaled Drareni a remis « en mains propres » une lettre au chef de l’État au nom de RSF, dans laquelle la libération d’Ihsane El Kadi et de tous les journalistes emprisonnés a été demandée ainsi que l’abandon des poursuites contre Interface Médias.

« J’ai dit que le secrétaire général de RSF voulait se déplacer en Algérie et le président m’a dit qu’il était le bienvenu », a révélé Khaled Drareni. « Je garde un sentiment d’optimisme. Attendons pour voir », dit-il.

Le jour même, RSF a publié son rapport annuel sur l’état de la liberté de la presse dans le monde. L’Algérie est classée à la 136e place sur 180 pays, figurant dans la catégorie des pays où la situation de la liberté de la presse est considérée comme « difficile ».

Crédit : Présidence de la République

« L’Algérie a confirmé sa dérive autoritaire en poursuivant notamment le patron de presse Ihsane El Kadi », a fustigé l’organisation.

De telles mises au pilori ne sont profitables à aucune partie, encore moins aux autorités, d’autant que les médias privés notamment sont fragilisés par l’impact de la crise politique, les restrictions et la crise économique ainsi que l’assèchement du marché publicitaire.

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