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Algérie – Espagne : chronique d’une dégradation inexorable

Algérie – Espagne : chronique d’une dégradation inexorable

Les relations entre l’Algérie et l’Espagne continuent de se dégrader. Mercredi, la crise entre les deux pays a pris une nouvelle tournure, avec la décision d’Alger de muscler sa riposte contre Madrid.

Tout a commencé le 18 mars dernier après l’annonce par Madrid de sa décision d’apporter son soutien au plan d’autonomie marocain au Sahara occidental, pour arriver ce 8 juin à la suspension par Alger du traité d’amitié qui encadre les relations entre les deux voisins méditerranéens depuis 20 ans.

Le même jour, l’Algérie décide de geler les opérations de domiciliation bancaire pour les importations et les exportations avec l’Espagne.

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En moins de trois mois, plusieurs annonces successives ont réduit les relations entre l’Algérie et l’Espagne à leur plus simple expression.

Le revirement spectaculaire du gouvernement de Pedro Sanchez sur le Sahara occidental a été qualifié par l’Algérie de « seconde trahison » du peuple sahraoui, la première étant le fait d’avoir laissé le Maroc occuper le territoire après son retrait au milieu des années 1970.

L’Algérie a d’abord rappelé son ambassadeur à Madrid le 19 mars, puis annoncé qu’elle modulera ses relations envers d’autres pays du sud de l’Europe, notamment en matière de coopération énergétique.

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Cette crise avec l’Espagne est survenue dans un contexte de tension mondiale sur le gaz à cause de la crise ukrainienne. L’Espagne et l’Italie, reliées par des gazoducs à l’Algérie, ont sollicité cette dernière pour des livraisons supplémentaires qui sécuriseraient leur approvisionnement immédiat et leur permettraient à terme de devenir un hub du gaz pour l’Europe.

L’Algérie a donc opté pour l’Italie avec laquelle un contrat sera signé le 11 avril portant augmentation des livraisons à hauteur de 9 milliards de m3 d’ici 2023-2024.

L’accord a été signé à l’occasion de la visite à Alger du Premier ministre italien Mario Draghi. Une visite qui sera suivie par celle du président Abdelmadjid Tebboune en Italie le 25 mai, au cours de laquelle des accords touchant d’autres secteurs ont été signés et l’excellence des relations algéro-italiennes réaffirmée.

« Pas un nuage d’automne »

Pendant ce temps, les relations avec l’autre voisin méditerranéen ne faisaient que se dégrader. L’Algérie s’est engagée à respecter ses engagements contractuels concernant les livraisons de gaz à l’Espagne qui est son deuxième plus grand client au monde, mais sans plus.

Fin avril, le ministère de l’Energie a même menacé de suspendre ces livraisons si l’Espagne venait à approvisionner le Maroc en gaz algérien. Toujours sur le plan économique, des médias espagnols ont rapporté que l’Algérie avait fermé son marché au bœuf espagnol, tandis que des importateurs algériens se sont plaints lors d’un récent sit-in devant le ministère du Commerce du blocage de leurs marchandises importées d’Espagne.

L’Algérie a fini par officialiser ces représailles économiques en gelant tout simplement le commerce extérieur avec l’Espagne, qui est l’un des principaux partenaires commerciaux dans le monde. La décision du gel a été annoncée mercredi par l’Association des banques et établissements financiers algériens (Abef). Un coup dur pour l’économie espagnole.

Pendant toute la durée de la crise, les autorités espagnoles ont très peu commenté les réactions successives d’Alger, mais ont été très prolixes pour défendre et justifier leur nouvelle position sur le Sahara occidental.

Pedro Sanchez s’est adonné ce mercredi au même exercice de justification devant le Parlement de son pays et c’est sans doute ce qui a précipité la suspension par Alger de l’accord d’amitié.

Le revirement du 18 mars a fait suite au chantage du Maroc sur la question migratoire et celle des enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla. Sanchez a mis en avant les intérêts de son pays, mais il semble qu’il n’a ni anticipé ni pris au sérieux la réaction d’Alger qui met aujourd’hui très à mal ces mêmes intérêts. Pourtant, les mises en garde de l’Algérie n’ont pas manqué pendant toute cette période.

« Ce qui se passe entre Alger et Madrid n’est pas juste un nuage d’automne qui va se dissiper rapidement. Ceux qui parlent d’une colère passagère de l’Algérie, ils ne sont pas en phase avec la réalité », a déclaré à la mi-avril Amar Belani, envoyé spécial algérien chargé du Sahara occidental et des pays maghrébins.

De son côté, le secrétaire général du ministère des Affaires étrangères a confié fin mars à un journal italien que l’Algérie « va revoir tous les accords avec l’Espagne ».

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