Consommation

Automobile : l’Algérie a « besoin de 250.000 véhicules par an »

Alignés au bord de l’autoroute de l’aéroport d’Oran, les showrooms de vente de voitures neuves ne gardent que les enseignes sur leurs façades.

Il n’y a ni véhicules à vendre, ni clients. Jadis grouillant de monde, l’endroit est devenu presque désert. Il illustre la crise grave dans laquelle est plongée la filière automobile en Algérie.

Des dizaines de milliers d’emplois ont été perdus et l’automobile est devenue un  luxe pour les Algériens. La suspension des importations des véhicules a laissé sur le carreau des centaines de distributeurs.

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« Il y a 5-6 ans on comptait entre 1 500 et 1 600 distributeurs et 40 marques de véhicules. Tout était en règle. Nous comptions des personnels formés dans la maintenance. Depuis, cette main-d’œuvre est partie », résume Tahar Mahyaoui, distributeur de la marque Peugeot en Algérie, et qui recense « au moins 120 personnes qui sont parties » à cause de la crise.

« Quand on multiplie ce chiffre par 1 500 distributeurs, on arrive à plus de 100 000 emplois perdus dans la distribution », ajoute-t-il au micro DZ News tv.

Ce distributeur, connu à Oran, critique la politique du montage automobile adoptée par le gouvernement à partir de 2014. « Plus de 100 000 emplois perdus dans la distribution pour 8 000 créés dans le cadre du montage. On lance une industrie pour créer de l’emploi. Sinon, à quoi bon ? », s’offusque le distributeur.

M. Mahyaoui dénonce le fait que les opérateurs dans le montage pratiquaient des prix plus élevés que ceux des distributeurs, alors qu’ils bénéficiaient d’avantages fiscaux.

« Nous, distributeurs, nous acquittions de la TVA et des droits de douanes et nous vendions à des prix raisonnables. Eux (les opérateurs lancés dans l’assemblage automobile) non seulement, ils ne payaient ni TVA ni droits de douanes, mais ils vendaient au double du prix de la valeur du véhicule », critique cet opérateur.

« Une Renault Symbol (importée) coûtait 90 millions (900.000 DA), avec le montage local son prix est monté à 180 millions (1,8 millions de dinars) », illustre le distributeur automobile qui juge « anormal » les prix pratiqués par les assembleurs locaux.

« Limiter les importations de véhicules à 250 000 par an »

Pendant ce temps, les prix des véhicules d’occasion ont flambé en raison de l’absence d’offres. « Une Toyota 85ch, 1L, année 2005 a été proposée à 280 millions », s’écrie Tahar Mahyaoui qui est par ailleurs le président du MC Oran.

Ce distributeur de la marque Peugeot appelle à relancer les importations des véhicules neufs en fixant un seuil de véhicules importés à 250.000 par an avec une enveloppe financière plafonnée  à 2 ou 2,5 milliards de dollars.

« 250 000 véhicules sont suffisants pour alimenter le marché algérien », estime ce distributeur. « En partant de la règle que lorsque l’offre est inférieure à la demande les prix augmentent. Une question de logique. Avec la concurrence, les prix vont baisser », soutient Tahar Mahyaoui.

Le blocage des importations des véhicules neufs fait le bonheur des rares revendeurs qui importent des voitures pour les revendre au prix fort en Algérie.

Un revendeur de véhicules admet qu’aujourd’hui après la suspension de l’importation, les véhicules d’occasion sont devenus inaccessibles. « De plus, les gens avaient cette possibilité de changer de véhicule. Aujourd’hui, pour vendre une voiture et en racheter une autre, l’automobiliste doit en ajouter au moins 300 millions (3 millions DA). C’est trop », estime ce vendeur.

Un citoyen interrogé par Dz News résume avec une pointe d’ironie l’état du marché du véhicule. « Une Maruti coûte 100 millions alors qu’avant avec cette somme on pouvait en acheter 4 avec bonus ». Un autre se montre carrément fataliste : « Un véhicule année 2016 coûte le prix du neuf à savoir entre 220 et 240 millions. Acheter un véhicule 2021 on n’y pense pas. Personne n’y songerait », dit-il.

Des compétences parties à l’étranger    

La filière automobile en Algérie a subi deux coups de boutoir : d’abord l’interdiction d’importer des véhicules neufs en 2016, et ensuite le blocage total des importations et le démantèlement des usines d’assemblage de voitures.

En 2016, le gouvernement avait décidé d’interdire les importations de véhicules neufs et obligé les concessionnaires à se lancer dans l’assemblage de véhicules, au risque de perdre leurs licences. En 2020, le gouvernement a mis fin au système trop onéreux pour le Trésor public du dispositif d’assemblage de véhicules, sans pour autant autoriser l’importation de voitures neuves.

Résultat : l’Algérie a perdu sur les deux tableaux.  Elle n’a pas pu développer une véritable industrie automobile, et a perdu de nombreuses compétences dans le secteur automobile qui ont pour la plupart quitté le pays pour s’installer à l’étranger.

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