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Conseils, menaces… : le marché agricole algérien vu par la France

Conseils, menaces… : le marché agricole algérien vu par la France

Le ministère français de l’Agriculture a publié la nouvelle version du Livre blanc « Où exporter ? Agro 2024 » qui concerne 40 pays dont l’Algérie. Le document donne des conseils précieux aux exportateurs français pour exporter davantage de produits agricoles vers l’Algérie.

Un document qui répertorie les opportunités d’exportations à l’intention des entreprises françaises. Parmi les 40 pays passés au crible sur différents continents figurent 7 pays africains dont l’Algérie.

Ce document en ligne est rédigé en partenariat avec Business France et le ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire.

Dans sa 16e édition, le Livre blanc agro consacre trois pages par pays étudié. En introduction, Laurent Saint Martin, directeur général de Business France, annonce immédiatement la couleur : « Cet ouvrage présente les grands enjeux et opportunités offertes par les marchés mondiaux et constitue ainsi une véritable bible pour les exportateurs confirmés et à venir ».

Concernant la partie Afrique, l’importance économique de l’Afrique du Nord est soulignée et est considérée comme « la porte d’accès à tout le continent africain au vu de sa proximité géographique » ainsi que comme « un marché très attrayant où tout reste à faire en dépit d’une concurrence qui ne cesse de s’accroître. »

Le marché agricole algérien suscite l’intérêt de la France

La partie consacrée à l’Algérie commence par une rapide énumération de chiffres clés puis le ton est rapidement donné à travers 2 rubriques : « Opportunités » et « Menaces ». Des rubriques certes communes à chacun des pays présentés.

En matière d’opportunités, il est fait état de « filières post-pétrole » agricoles et agroalimentaires. Des filières notées comme prioritaires qui « bénéficient du soutien de l’Etat » français.

Quant aux « menaces », la rubrique concerne essentiellement les « restrictions des importations de produits finis ». L’Algérie est ainsi qualifiée de « marché d’opportunité mais fortement concurrentiel ». Une appréciation plusieurs fois rappelée.

Parmi les faits marquants sont notés l’évolution des importations de l’Algérie 2022 en provenance de France (+21 %) et de l’Union Européennes (+48 %) ainsi que les évolutions récentes de la législation algérienne.

En matière de contexte agricole, l’attention des investisseurs est attirée sur le manque de pluies et sur les plans de développement agricoles dont ceux liés aux cultures stratégiques.

Le recueil entre ensuite dans le vif du sujet à travers une rubrique : les incontournables de la grande distribution (GD) en Algérie.

Il est fait mention de la forte expansion des centres commerciaux, des grandes et moyennes surfaces, des plateformes de e-commerce ainsi que du développement des livraisons de repas à domicile. Le document insiste sur les enseignes de la grande distribution qui « sont aujourd’hui ancrées dans les habitudes algériennes ».

Les habitudes des consommateurs algériens sont systématiquement passées au crible, et sont notés comme étant « de plus en plus exigeants ».

Quant aux tendances en cours, il apparaît que les produits algériens sont privilégiés de même que les produits « premium, bio et healthy » notamment auprès de la classe moyenne.

Il est ainsi rappelé aux entreprises françaises que « l’origine des produits, la qualité des ingrédients et l’emballage sont des atouts essentiels à valoriser ». A ce titre, les progrès algériens en matière de contrôle qualité sont soulignés.

Le document revient largement sur la rubrique « Menaces » déclinée à travers la volonté des pouvoirs publics en Algérie de « stimuler la production locale avec des restrictions d’importations ».

Il apparaît que malgré les plans de développement agricoles en cours, les importations de produits agricoles et agroalimentaires ont progressé de près de 25 % en 2022 pour atteindre 10,2 milliards d’euros.

Une hausse expliquée par l’importation croissante d’intrants et de matière premières : céréales, produits laitiers, oléagineux, graines et semences. Ce qui aurait permis que la France « retrouve sa position de 2ème fournisseur » devant l’Argentine et le Brésil.

Sont ensuite déclinés différents secteurs avec une « synthèse marché et principaux fournisseurs » et à chaque fois une infographie qui permet aux entreprises françaises de se faire une idée des pays déjà positionnées sur le créneau « Algérie ».

Le premier secteur analysé concerne les céréales. Si le document évoque à juste titre la diversification des achats algériens, notamment à travers l’émergence des blés de la mer Noire, il tacle la filière française en des termes forts : « La diminution de la part de marché de la France s’explique par la négligence des opérateurs sur le marché du blé tendre ».

Il est cependant souligné que malgré des prix élevés, le marché des intrants agricoles et des équipements « offre de belles opportunités aux entreprises françaises qui bénéficient d’une excellente réputation ».

En matière d’élevage en Algérie, il est question d’une « filière jugée comme prioritaire et stratégique » et il est rappelé les « importantes opportunités » pour les entreprises françaises qui, malgré une « place prépondérante de la France », sont talonnées par l’Argentine et l’Italie.

En matière d’équipements agro-alimentaires, le document indique un montant croissant d’importations en Algérie avec 1 milliard d’euros en 2022 et le succès de la présence française dans le segment des mini-laiteries, de l’industrie sucrière et du couscous. Il est notamment fait mention de diverses opportunités : chaîne du froid, emballage, transformation ou stockage.

Le secteur algérien des boissons sans alcool est présenté comme « l’une des filières les plus dynamiques » et suggère aux investisseurs français potentiels de « se positionner parmi les produits phares : eaux embouteillées, jus de fruit et boissons fruitées, sodas, boissons lactées ».

Dans le secteur de la boulangerie, viennoiserie, pâtisserie (BVP) avec près de 60 % du marché algérien, les entreprises françaises sont en position dominantes devant l’Espagne et la Belgique. Il est fait mention de l’émergence d’enseignes locales proposant « des produits occidentaux » et de nombreuses opportunités.

A noter l’observation concernant la baguette classique que délaisserait de plus en plus le consommateur au profit « des pains plus sains » à base de pains complets.

En matière de céréales, il est rappelé que la production locale ne couvre que 30 % des besoins de l’Algérie. Avec 22 % de part du marché, la France est talonnée par l’Argentine. Mais en ce qui concerne le blé tendre, le document mentionne la concurrence croissante de pays de l’Europe centrale et orientale (Roumanie, Bulgarie, Ukraine et Russie).

Marché agricole : comment mieux démarcher les opérateurs algériens

Le document n’oublie pas les témoignages d’industriels comme celui de la PME Alicoop spécialisée dans la nutrition animale. Son directeur n’hésite pas à signaler l’accompagnement précieux dont il a bénéficié : « L’expertise et l’engagement de Business France Algérie ont joué un rôle essentiel lors de notre participation au salon professionnel SIPSA en nous aidant à trouver des partenaires et en facilitant nos relations commerciales avec les acteurs algériens ».

Parmi les points abordés, certains sont savoureux à l’image de la rubrique « Expertease » qui propose des conseils en matière de prise de contact avec les opérateurs algériens.

Le rendez-vous en face-à-face est ainsi noté comme le meilleur moyen de communiquer. Il est également recommandé d’entretenir « les relations par des visites régulières, des appels et des mails. Les Algériens accordent beaucoup d’importance au relationnel, notamment informel, et aux attentions particulières (voeux pour les fêtes, invitations, etc). » Enfin, il est précisé que « le français est la langue des affaires. La pratique de l’arabe n’est donc pas indispensable. »

La nouvelle édition du recueil « Où exporter ? Agro 2024 » est sans aucun doute instructif dans la mesure où il est rédigé par des personnes ayant une connaissance fine des sujets traités, on notera le style sobre et pratique.

Il s’agit d’une mine de renseignements pour les entreprises françaises mais également pour les exportateurs algériens à la recherche de marchés à l’export.

A ce titre, il serait souhaitable qu’en Algérie, le ministère du commerce et de la promotion des exportations mette à disposition des exportateurs algériens ce type de document.

Ce recueil peut également renseigner sur les évolutions ayant cours sur d’autres continents en matière de transition alimentaire. C’est le cas avec la rubrique les « alternatives végétales » aux produits à base de viande.

Le document français fait mention des marchés Europe, Etats-Unis et Chine : « Les marchés européens et nord-américains restent prioritaires [pour la France]. En Asie-Pacifique et Asie du Sud, les consommateurs, à la recherche de sécurité alimentaire et d’aliments sains, plébiscitent les alternatives végétales dans un contexte de hausse des prix des produits animaux ».

Ce type de comportement mérite l’intérêt dans le contexte de sécheresses récurrentes qu’affronte l’Algérie.

Par ailleurs, lorsqu’à propos de l’Algérie, le recueil fait état de réduction des surfaces de jachère et d’optimisation des solutions d’irrigation vers des utilisations intelligentes, on aurait pu s’attendre à ce que la notion de partenariat gagnant-gagnant soit plus développée.

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