Politique

Entretien avec Seddik Chiheb : « Le président de la République n’a besoin de désavouer personne »

Seddik Chihab est le porte-parole du RND. Dans cet entretien, il revient sur l’annulation par le président Bouteflika des hausses des tarifs des documents biométriques, et d’autres sujets d’actualité.

Hier en Conseil des ministres, le président Bouteflika a annulé l’augmentation des tarifs des documents biométriques proposée par le gouvernement dans le projet de loi de finances complémentaire 2018. Comment expliquez-vous cela ?

Le président de la République a démontré une fois de plus son attachement au principe édicté dans la déclaration du 1er novembre 1954, à savoir la construction d’un État social. Et par conséquent, il veille à ce que la crise économique ne soit pas supportée uniquement par le peuple. Cela étant dit, je pense que l’Exécutif est tenu à rechercher les voies et moyens de maîtriser le déficit budgétaire par l’amélioration de la fiscalité ordinaire.

Après les concessions agricoles, le président rejette l’augmentation des tarifs des documents biométriques. Est-ce un désaveu pour Ahmed Ouyahia ?

Le président de la République n’a besoin de désavouer personne. Il est le garant de la Constitution. Il veille scrupuleusement à la bonne marche des institutions et à la sauvegarde des intérêts de l’Algérie et des Algériens.

Le président Bouteflika recadre assez souvent le Premier ministre comme on l’a vu avec l’affaire des concessions agricoles et dernièrement avec le tarif des documents biométriques…

Ahmed Ouyahia est Premier ministre. Et du fait des lois qui régissent la fonction, il n’est qu’un coordinateur de l’activité gouvernementale. La préparation d’un projet de loi ne se fait pas à la primature mais dans les ministères concernés par le dossier d’abord. Par la suite, il y a le conseil de gouvernement qui discute des propositions qui doivent ensuite être ou pas validées en conseil des ministres.

Pourquoi Ahmed Ouyahia est régulièrement pointé du doigt lorsqu’il s’agit de ce genre de décisions ?

Ahmed Ouyahia fait partie de ce genre de personnes rigoureuses qui veulent faire avancer les choses. Il ne laisse pas les gens indifférents. Il suscite beaucoup d’intérêts car il est courageux. Il a cette capacité d’endosser les décisions qui relèvent de l’intérêt de l’État; fussent-elles impopulaires. Ce qui le différencie de beaucoup de responsables politiques qui ont eu à occuper ce poste et qui ne cherchaient qu’à embellir leur propre image.

Ahmed Ouyahia donne la priorité à la rigueur de l’État et au bon fonctionnement des institutions au détriment de sa propre personne et parfois de son propre parti politique. Et puis, mettre les bâtons dans les roues à ceux qui veulent faire avancer les choses est devenu monnaie courante.

Vous avez déjà parlé de ceux que le sérieux et la rigueur d’Ouyahia dérangent. Qui sont-ils ?

Ils sont nombreux et ils sont partout. Nous avons toujours dénoncé les tenants du statu quo au RND. Ceux qui veulent que les choses restent en l’état et que les réformes n’aillent pas jusqu’au bout. Ceux qui veulent que le mode de gestion et de gouvernance ne change pas ou ne change que dans les énoncés. Les résistances au changement s’expriment souvent par la voie politique et par les entraves bureaucratiques.

Est-ce que vous mettez le patron du FLN, qui ne rate aucune occasion pour critiquer le Premier ministre, dans cette catégorie ?

Je pense que l’exercice politique et l’exercice de la démocratie, la gestion ou la gouvernance au quotidien impliquent des règles. Parfois, les gens ne sont pas imprégnés par ces règles. Et pour échapper à leur banalité, ils se focalisent sur ceux qui travaillent et ceux qui veulent faire avancer les choses. Ceux qui veulent pousser les Algériens vers une nouvelle dynamique.

L’Organisation nationale des Moudjahidin dénonce les propos d’Ahmed Ouyahia sur les pieds noirs. Un commentaire ?

Nous nous sommes déjà exprimés sur le sujet des pieds noirs. Je n’ai aucun commentaire à faire là-dessus.

Dans de nombreuses activités publiques, on voit beaucoup plus Noureddine Bedoui qu’Ahmed Ouyahia. Pourquoi ?

M. Bedoui est dans son rôle de ministre de l’Intérieur. Nous saluons son dynamisme et sa volonté de veiller au bon fonctionnement de nos collectivités locales et l’amélioration des services publics. Il a réussi une avancée remarquable sur le terrain de la lutte contre la bureaucratie, il a réussi le pari de moderniser un tant soit peu notre administration.

Le FMI a exprimé une nouvelle fois ses inquiétudes concernant l’Algérie. Est-ce que ses rapports vous inquiètent toujours ?

Je pense que c’est un peu prématuré d’apporter un jugement sérieux sur le choix souverain que l’Algérie a pris en recourant au financement non-conventionnel. En fait, c’est prématuré de faire le procès d’une démarche qui vient à peine d’être mise en place.

Et dans ses prévisions, le conseil d’administration du FMI a relevé que l’Algérie est confrontée à des difficultés par rapport à la baisse des prix de pétrole et du ralentissement de son activité économique. Cependant, les administrateurs prennent bonne note des mesures prévues par le gouvernement dont la reprise de l’assainissement des finances publiques à moyen terme.

Dans sa vision, le FMI préfère nous voir aller emprunter à l’extérieur. Je pense que la décision du président de la République est souveraine. Nous avons des capacités. L’Algérie est solvable.

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