Économie

ENTRETIEN. Jusqu’où ira la dépréciation du dinar algérien ?

Selon l’économiste Brahim Guendouzi, le scénario de 2020 est en train de se répéter en Algérie avec une récession économique pour la deuxième année consécutive sur fond de 3e vague de la pandémie de covid. Entretien.

Comment se présente la situation en Algérie dans le contexte de rebond de la pandémie du covid-19 et du retour au confinement ?

Les signes de reprise économique constatés au premier semestre risquent d’être anéantis durant ce second semestre avec le rebond de la pandémie (troisième vague) et le retour au confinement partiel.

Autant dire que le scénario de 2020 est en train de se répéter, à savoir une récession économique pour la deuxième année consécutive.

C’est un mauvais signe pour l’économie nationale car la pression se fera ressentir sur les finances publiques, d’une part, et sur les finances des entreprises, d’autre part. Dans ce cas, la menace est claire : une stagnation économique accompagnée d’une inflation (stagflation).

Le dinar a enregistré hier dimanche un nouveau record historique face au dollar. Le billet vert a franchi la barre des 135 dollars pour s’échanger à 135,09 dinars. Jusqu’où ira la dépréciation de la monnaie nationale ?

La modification du taux de change du dinar est la variable d’ajustement la plus évidente face aux déficits interne et externe.

Plus ceux-ci perdurent dans le temps et plus le dinar perdra régulièrement de sa valeur. La modération dans la dépréciation de la monnaie nationale peut éventuellement atténuer les effets immédiats notamment sur la structure des prix.

La Banque d’Algérie a annoncé le 30 juin un plan de financement de l’économie d’un montant de 2.100 milliards de dinars. Près d’un mois après, il n’a pas connu de lancement effectif. Pourquoi ?

La question du financement de l’économie nationale devient sensible dans le contexte actuel caractérisé par le rebond du covid-19 avec ses différents variants.

La Banque d’Algérie a été la première à prendre des décisions importantes en matière de politique monétaire, annoncées par un communiqué de son Comité des opérations de politique monétaire (COPM) en date du 29 mars 2020 en vue d’amener les banques à consacrer plus de crédits aux entreprises particulièrement aux PME qui ont subi les retombées de la crise sanitaire.

Le  règlement n°2021-02 du 10 juin 2021 adopté par la Banque d’Algérie et portant programme spécial de refinancement en soutien au programme de relance de l’économie nationale, consiste en un mécanisme de financement monétaire d’un montant de 2100 milliards de dinars échelonné sur douze mois.

Les modalités pratiques ne sont pas encore définies tant l’instruction qui suit le règlement en question n’est pas encore publiée. Cependant, c’est aux autres acteurs que sont les entreprises, les banques et le Trésor d’exprimer les besoins pour lesquels la Banque d’Algérie consent à apporter les refinancements nécessaires. Probablement, avec la mise en place du nouveau gouvernement, les choses vont s’accélérer sur ce plan.

Près d’un mois après sa nomination, le gouvernement Benabderrahmane donne-t-il à voir une stratégie claire de sortie de crise ?

Avec l’apparition de cette troisième vague de la pandémie, dont l’évolution est toujours incertaine, le gouvernement sera amené à privilégier des actions de court terme afin d’atténuer autant que faire se peut les effets de la crise sanitaire aussi bien sur la population que par rapport aux entreprises.

La marge de manœuvre sera limitée car le lancement de grands chantiers structurants sera retardé. Les déficits tant internes qu’externes vont s’accumuler rendant ainsi plus complexe la question de financement dans l’économie nationale.

L’adoption du financement monétaire décidé par la Banque d’Algérie ainsi que l’ajustement du taux de change s’avèreront insuffisants pour combler le manque de ressources nécessaires à la relance économique.

Tant qu’il n’y a pas d’autres sources de financement notamment en devises, il est à craindre une forte pression sur le niveau des réserves de change. Sur le plan organisationnel, on s’interroge d’ailleurs pourquoi il n’y a eu de désignation d’un ministre des Finances car comme on le sait, la fonction de Premier ministre est très prenante, ce qui pourrait se faire ressentir en termes d’efficacité.

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