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Essais nucléaires et archives : ce que reproche l’Algérie à la France

Essais nucléaires et archives : ce que reproche l’Algérie à la France

Le règlement du contentieux mémoriel entre l’Algérie et la France avance bien, assure le ministre des Moudjahidine Tayeb Zitouni, sauf sur deux aspects : la question des archives et celle des essais nucléaires effectués par la France dans le Sahara algérien.

Sur ce point, qu’il qualifie de sujet « le plus sensible de ceux de la mémoire », le ministre accuse gravement les autorités françaises.

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« La partie française refuse de remettre les cartes topographiques qui permettent de déterminer les lieux d’enfouissement des déchets polluants, radioactifs ou chimiques non-découverts à ce jour », révèle-t-il dans un entretien diffusé par l’APS à la veille de la commémoration de la fête de l’Indépendance.

Tayeb Zitouni charge encore la France qui « n’a mené techniquement aucune initiative », selon lui, en vue de « dépolluer les sites » où les essais nucléaires ont été effectués.

La France « n’a fait aucun acte humanitaire » en vue de dédommager les victimes, assène encore le ministre des Moudjahidine.

La France a effectué dès l’année 1960 des essais nucléaires dans le Sahara algérien. Ces essais se poursuivront après l’indépendance, jusqu’en 1967. Au total, 17 essais ont été effectués pendant cette période.

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Outre leurs effets immédiats, ces essais continuent encore à faire des victimes parmi la population locale, avec l’augmentation de tous types de pathologies. 55 ans après, ils causent encore des maladies cancéreuses et des malformations physiques.

Disposer de la cartographie des essais est de nature à permettre à l’Algérie de « prendre les mesures de prévention nécessaires pour la protection de l’environnement et de la population, par crainte d’une exposition aux rayonnements résiduels dans des zones qui connaissent une augmentation en termes de nombre des cancéreux, tous types confondus, et de malformations congénitales et d’autres manifestations pathologiques troublantes », explique Tayeb Zitouni.

Il s’agit « d’irréfutables preuves des crimes perpétrés, dont les radiations continuent d’affecter l’Homme et l’environnement », relève-t-il encore.

Autre reproche fait à la France, la non-indemnisation des victimes de ces essais. Selon M. Zitouni, les conditions « rédhibitoires » prévues dans la loi Morin du 5 juillet 2010 n’avaient permis aux Algériens de bénéficier d’aucune indemnisation jusqu’à ce jour.

La loi exige, entre autres conditions pour se faire indemniser, d’être résident sur les lieux des essais pendant la période 1960-1967, ce qui n’est pas le cas de la majorité des victimes qui ont été impactées des décennies plus tard.

« Ils veulent que le dossier soit traité dans le plus grand secret »

À retenir aussi cette révélation : les Français ne souhaiteraient pas traiter le dossier dans la transparence. « Les autorités françaises insistent encore sur le fait de traiter le dossier des essais nucléaires dans le plus grand secret, en dépit des nombreuses tentatives de juristes et d’associations de victimes des essais nucléaires français en Algérie, qui ont œuvré à ouvrir l’archive, propriété des deux pays, au moins pour déterminer les sites et le champ d’essais », regrette le ministre algérien.

À propos des archives, elles font partie des questions qui « n’ont pas connu d’évolution », ainsi que celle des disparus, révèle encore Zitouni qui estime que cela « requiert de la partie française de s’engager et de répondre à la demande de l’Algérie, en lui permettant de récupérer ses archives nationales et de fournir les informations suffisantes relatives aux disparus algériens et aux lieux où ils se trouvent ».

Début juin, le président de la République Abdelmadjid Tebboune avait soulevé de nouveau la question dans une interview à l’hebdomadaire français le Point, réitérant sa demande à la France de « nettoyer les sites des essais nucléaires ».

« Que la France soigne les victimes des essais nucléaires. Le monde s’est mobilisé pour Tchernobyl alors que les essais nucléaires en Algérie provoquent peu de réactions. Ils ont pourtant eu lieu à ciel ouvert et à proximité des populations », a-t-il souligné.

La prise en charge de la question des essais nucléaires français en Algérie fait partie également des propositions contenues dans le rapport élaboré en janvier dernier par l’historien Benjamin Stora à la demande du président français Emmanuel Macron. Stora avait qualifié les essais de l’une des « questions brûlantes, relevant du passé colonial commun ».

À noter que ce n’est pas la premières fois que les autorités françaises sont accusées de ne pas faciliter la tâche à leurs homologues algériennes dans leurs efforts pour prendre en charge les retombées de la guerre de Libération sur la population.

En 2005, le président Abdelaziz Bouteflika avait révélé que la France refusait de remettre aux Algériens la cartographie des champs de mines des lignes Challe et Morice. Aujourd’hui encore, ces mines disséminées le long de la frontière avec la Tunisie, font des victimes parmi la population civile.

 

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