Économie

Huile d’olive : l’Algérie absente du top 10 des pays exportateurs

La publication spécialisée Asharq Business a publié son top 10 des pays exportateurs d’huile d’olive pour l’année oléicole 2022-2023. La Tunisie et le Maroc y figurent mais l’Algérie en est absente. Un constat étonnant au vu du nombre important de médailles raflées par les marques algériennes dans des concours internationaux.

La Tunisie figure à la 3ème place avec 84.400 tonnes exportées et le Maroc à la 9ème place avec 3.200 tonnes. C’est l’Espagne qui domine avec près de 150 000 tonnes.

Huile d’olive, une stratégie pour l’Algérie

Actuellement le marché mondial de l’huile d’olive est dominé par plusieurs pays méditerranéens dont les traditions de plantation à large échelle et la politique d’exportation sont anciennes. En Algérie, les plantations concernent essentiellement le nord du pays en région de montagne et depuis peu les zones steppiques.

Le nombre de médailles obtenues dans les concours internationaux par des marques algériennes comme Dahbia et Baghlia constitue un signe tangible des possibilités de production d’huile d’olive de qualité dont l’huile vierge extra.

Cependant, force est de constater que si le récent effort d’investissement dans la filière trituration permet de produire des huiles d’olive de qualité, il reste encore largement insuffisant.

Pour arriver aux normes internationales, les olives doivent avoir un faible degré d’acidité. Ce qui suppose qu’elles ne séjournent pas plus d’une journée à l’air avant de passer dans un moulin. Or, nombreuses sont les huileries dont les sacs d’olives des producteurs s’entassent plusieurs jours avant d’être traités.

Les experts du projet Programme agricole de soutien à l’agriculture (PASA), notent également l’importance du packaging.

Il ne s’agit pas simplement d’esthétique, mais l’huile d’olive ne supporte pas d’être conditionnée dans des bouteilles en plastique ou en verre transparent. Malgré l’existence de deux verreries en Algérie, la filière locale peine à intéresser les industriels du verre. Seul le verre opaque est autorisé sur le marché mondial.

Dans le cadre du PASA co-financé par des fonds européens, un travail de fond est actuellement engagé par la filière oléicole en Algérie. Cependant, bien qu’en progression, les quantités d’huile d’olive locales nécessaires pour alimenter massivement et sans rupture de stock les acheteurs internationaux ne sont pas encore disponibles.

En 2022 à elle seule, la Tunisie a exporté jusqu’à 200.000 tonnes d’huile d’olive dont 90% en vrac. La marque tunisienne Terra Delyssa présente dans la plupart des grandes surfaces françaises représente 20% de ces exportations et 55% des exportations en huile d’olive conditionnée.

Pour exporter, se fondre dans la masse

Pour pouvoir exporter sur le marché français, de nombreux producteurs méditerranéens se fondent dans la masse en acceptant que leur huile soit vendue sans mention d’origine. C’est le cas de l’embouteilleur Puget. Cette marque approvisionne principalement le marché français dont les besoins annuels atteignent 100 millions de litres. A comparer avec une production locale de 4 millions de litres.

Pour arriver à répondre à la demande française, Puget importe de l’huile d’olive d’Espagne (jusqu’à 70%), d’Italie, de Grèce, du Portugal, du Maroc, de Tunisie …

Des huiles qui arrivent en vrac dans l’usine de Vitrolles près de Marseille. Une huile vierge extra avec un taux d’acidité inférieur à 0,8%.

L’usine réalise ensuite un assemblage à partir de 17 origines différentes. Un assemblage identique à celui des années 60 lorsque le vin d’Algérie permettait de relever le degré du « gros rouge » français. Chez Puget, une équipe de 14 testeurs attitrés vérifie scrupuleusement que l’assemblage reste identique une année sur l’autre.

Avec une capacité de 12 000 bouteilles par heure, Puget arrive à produire 25 millions de bouteilles par an. Dans cet étonnant mélange d’huiles de différentes origines, les producteurs y perdent leur âme. Depuis peu, Puget innove cependant en mettant en bouteille deux huiles dont l’origine est mentionnée : Grèce et Maroc.

C’est en 2003 que la société Lesieur (Groupe Avril) a racheté la marque Puget. Le groupe français Avril est présent en Algérie à travers des accords avec la société SIM pour la production d’aliments du bétail à Aïn Defla et à Tessala El Merdja avec l’entreprise Djaddi pour la production de mayonnaise. À ce jour, Puget n’a jamais proposé aux producteurs algériens d’achat en vrac d’huile locale à destination du marché français.

Le positionnement de l’huile d’olive d’Algérie

Cet état de fait n’empêche pas l’essor actuelle de la filière huile d’olive en Algérie. Pour Olivier Rives principal-coordinateur et chef de projet PASA du Pôle Soummam, filière oléicole, le marché mondial est dominé par des producteurs méditerranéens qui depuis des années travaillent dans une optique d’exportation.

C’est le cas du verger industriel espagnol qui est aujourd’hui en position largement dominante. Aussi, estime-t-il, le potentiel des huiles d’olive algériennes doit viser un positionnement à l’export vers le haut de gamme.

Avec une place de 8ème pays au monde en termes de production d’huile d’olive, cet expert juge que la production de l’Algérie peut progresser de 20 à 30%. Il se dit optimiste quant aux chances qu’a l’huile algérienne de conquérir les marchés internationaux.

Dans cette optique, en 2022 le PASA a sélectionné de façon rigoureuse 15 moulins et les a fait participer à l’un des plus grand salon professionnel agroalimentaire mondial, le SIAL de Paris. Ces moulins ont pu se frotter aux acheteurs étrangers et à leurs exigences en matière de qualité et de quantités.

Essor des exportations

Une stratégie de haut de gamme qu’adoptent déjà plusieurs producteurs locaux avec les marques d’huile d’olive Baghlia, Dahbia ou Numidia. Dès 2017 celle-ci exportait 15.000 litres d’huile d’olive en Europe.

La marque Baghlia innove en produisant une huile issue de ses propres oliveraies mais également à partir d’olives achetées à des producteurs selon un strict cahier des charges. Quant à la marque Dahbia, elle vise le marché du bio avec des olives récoltées le matin et triturée l’après-midi.

On assiste à un essor des exportations algériennes de l’huile d’olive. Selon des données du ministère du Commerce, en 2021 ces exportations ont concerné 600.000 litres mobilisés par 78 opérateurs vers 19 pays soit un montant de 2 millions de dollars.

En janvier dernier le ministère indiquait viser pour 2024 des exportations de l’ordre de 5 millions de dollars à travers une centaine d’opérateurs travaillant avec 50 pays différents.

Cet objectif ne peut être atteint sans un effort sur le packaging. Lors des deux dernières éditions du Salon international de l’agriculture (SIAL) de Paris, des producteurs Algériens ont présenté des huiles dans des contenants en plastique alors que les normes internationales privilégient le verre opaque.

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