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« Mon deuxième prénom est Moussa » : vive polémique entre Darmanin et Zemmour

« Mon deuxième prénom est Moussa » : vive polémique entre Darmanin et Zemmour

L’extrême-droite française compte exploiter à fond le meurtre d’un adolescent lors d’une fête de village pour s’attaquer aux Français qui portent des prénoms maghrébins.

Éric Zemmour, le président de Reconquête, fait des prénoms des présumés coupables une affaire dans l’affaire, déclenchant notamment une vive polémique avec le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin.

On comprend mieux les raisons du « retard à l’allumage » de la droite et de l’extrême-droite ainsi que d’une partie de la presse française dans cette affaire du meurtre du jeune Thomas, 16 ans. Le jeune homme a été poignardé à mort, samedi 18 novembre, dans une bagarre au cours d’une fête dans un village à Crépol, dans la région de la Drôme.

Dès l’annonce de la mort du jeune Thomas, les milieux xénophobes se sont donnés le mot pour politiser l’affaire dans un contexte de divisions par rapport à la guerre en Palestine et de débat au Parlement sur la nouvelle loi sur l’immigration. La polémique a pris de l’ampleur après la publication sur les réseaux sociaux des noms et des prénoms des suspects par un militant de l’extrême droite.

La gendarmerie a identifié et a arrêté neuf suspects, tous inculpés d’ « homicide volontaire ». Six d’entre eux ont été écroués. D’après les explications du procureur, l’enquête préliminaire n’a pas pu établir que les victimes ont été ciblées à cause de leur appartenance ethnique ou religieuse.

Aussi, l’homme présenté dans certains médias comme étant l’auteur des coups de couteau mortels, et qui porte un prénom à connotation maghrébine (Chaid A.), n’a pas été formellement reconnu par les témoins lors des auditions. Le procureur a mis en garde contre les déductions « hâtives », mais l’extrême-droite ne lâche pas prise, insistant sur les prénoms des mis en cause.

Éric Zemmour, qui fait du prénom un gage de citoyenneté, d’intégration et de bonne conduite en France, a frontalement attaqué le ministre de l’Intérieur, coupable à ses yeux d’avoir « voulu cacher les prénoms » des suspects.

En décembre 2021, Éric Zemmour a reproché à Zinédine Zidane de porter un prénom musulman. Il aurait dû s’appeler « Jean », d’après Zemmour, dont les parents sont, comme ceux de l’ex-capitaine de l’équipe de France, originaires d’Algérie.

« Chacun comprendra pourquoi… Vous ne pouvez pas lui cacher indéfiniment les causes de son malheur », a déclaré Éric Zemmour. Si la phrase semble énigmatique, Gérald Darmanin l’a déchiffrée et, surtout, il a compris qu’elle lui est destinée.

Le ministre a tenu à partager le sens du dérapage d’Éric Zemmour. « Je sais pourquoi il le dit : mon deuxième prénom, c’est Moussa. Je suis petit-fils de combattants français qui viennent d’Algérie. Il ne le fait pas par hasard », a indiqué Darmanin sur les ondes de France Inter.

France : Éric Zemmour attaque Gérald Darmanin sur son deuxième prénom, Moussa

Le ministre de l’Intérieur a assuré qu’il prenait l’attaque comme « une insulte personnelle » et qu’il laisse les insinuations d’Éric Zemmour dans « le côté nauséabond de sa pensée ».

Gérard Darmanin a rappelé que la divulgation des identités des suspects dans les affaires pénales est du ressort du procureur et non du ministre de l’Intérieur.

Les neuf suspects inculpés pour le meurtre de Thomas sont dans une « très large majorité des Français », et de ce fait, Gérald Darmanin a rejeté cette manière de classer les citoyens « selon les grands-parents, les quarts de grands-parents », contrairement à Éric Zemmour qui « met les gens dans des cases », et qui « pense qu’ils sont délinquants parce qu’ils sont étrangers ».

Le fondateur de Reconquête a enfoncé le clou en répondant au ministre, niant qu’il l’a attaqué à cause de son deuxième prénom, mais insistant sur le fait « que c’est bien par lâcheté »  qu’il a voulu « cacher ces noms ».

L’extrême-droite a toujours veillé à mettre cette question du prénom au centre du débat à chaque affaire médiatique ou événement important impliquant les musulmans, les immigrés ou les Français d’origine étrangère.

Lors des émeutes qui ont suivi le meurtre du jeune Nahel par un policier en juin dernier à Nanterre, l’extrême-droite avait vivement protesté contre le même Gérald Darmanin qui a révélé que parmi les casseurs interpellés, il y avait des jeunes qui s’appellent Kevin ou Matteo…

Les statistiques ethniques étant interdites en France, les milieux xénophobes évoquent régulièrement, mais souvent sans preuve tangible, la récurrence des prénoms étrangers, notamment maghrébins et musulmans, dans les affaires pénales ou parmi la population carcérale.

Éric Zemmour est de ceux qui insistent particulièrement sur l’importance du prénom, estimant que pour être français, il faut porter un prénom français. En janvier dernier, il a été condamné à 4.000 euros d’amende pour avoir qualifié le prénom de la chroniqueuse Hapsatou Sy d’ « insulte à la France ».

Pas plus tard que la semaine passée, il a classé les victimes de la violence en France suivant leurs prénoms : « Lola, Thomas, Laura, Maurane, Julien, Dominique, le père Hamel » et « Nahel et Traoré ». « Leurs martyrs sont des délinquants multirécidivistes. Nos martyrs sont des victimes innocentes de la guerre de civilisation », a-t-il tweeté.

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