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Nahel, immigration… : l’Algérie au centre des débats politiques en France

Nahel, immigration… : l’Algérie au centre des débats politiques en France

La France traverse une crise socio-politique majeure depuis le décès du jeune Nahel tué par un policier lors d’un contrôle routier mardi 27 juin à Nanterre, et l’Algérie est souvent citée dans les débats.

Alors que le pays sort de plusieurs jours d’émeutes violentes, on pourrait penser que les débats politiques devraient tourner en priorité autour des violences policières ou de la crise des banlieues.

Pourtant, ce n’est pas le cas. Une partie de la classe politique française n’oublie pas de gérer une autre épine qu’elle a dans le pied depuis longtemps : l’Algérie.

Affaire Nahel : nouvelle occasion pour l’extrême-droite de critiquer l’Algérie

Étant donné les origines algériennes de Nahel, l’Algérie a très vite réagi au décès de l’adolescent. Le ministère des Affaires étrangères algérien a fait part de son "choc" après ce tragique événement et s’est dit « soucieux de la quiétude et de la sécurité dont doivent bénéficier nos ressortissants sur leur terre d’accueil. »

Ce communiqué fait finalement écho à celui de l’ONU qui a demandé à la France de se pencher sur les problèmes de racisme et de discrimination raciale au sein de la police. Pourtant, les deux communiqués n’ont pas été reçus de la même manière en France. Les mots de l’Algérie ont été très mal pris.

« Si elle croit pouvoir s’inquiéter pour ses ressortissants présents en France, qu’elle n’hésite pas à les récupérer, à commencer par ceux qui violent les lois de la République française », a estimé Jordan Bardella, le président du parti d’extrême-droite, le Rassemblement National.

Ce dernier n’a pas hésité à profiter de cet événement pour remettre l’Algérie à sa place. Notamment sur la question de l’immigration des Algériens qui est l’un des combats centraux de l’extrême-droite française. Un jeu politique devenu systématique. Pour le dirigeant du RN, le drame que vit la France est essentiellement dû à une immigration délinquante. En sous-texte, une immigration algérienne.

Un argument repris largement par l’extrême-droite comme par la fachosphère. Eric Zemmour premier adversaire assumé de l’Algérie, a encore martelé au micro d’Europe 1 la nécessité d’arrêter l’immigration, de supprimer le droit du sol ou encore le regroupement familial. Une référence indirecte à la présence algérienne en France qui représente l’une des premières communautés étrangères en France.

Une résonance aussi avec la campagne anti-accord de 1968 en France menée à droite comme à l’extrême-droite depuis plusieurs mois. L’ancien ambassadeur de France à Alger Xavier Driencourt, l’ex-Premier ministre Edouard Philippe et régulièrement des figures politiques de l’extrême-droite n’ont eu de cesse, ces derniers temps, d’agiter ce vieil accord gérant les flux d’immigration de l’Algérie vers la France. Tous demandent sa suppression.

La croyance d’une hostilité algérienne constante à l’égard des Français

La mort de Nahel n’a pas seulement été instrumentalisée pour promouvoir le blocage de l’accueil des Algériens en France. L’extrême-droite tente d’attribuer à l’Algérie une responsabilité dans les émeutes qui ont éclaté après la diffusion de la vidéo de la mort de Nahel.

« L’Algérie a sa part de responsabilité dans ce qui se passe en France, nous ferons là encore respecter les voix de la diplomatie française », a lancé de manière floue et mystérieuse Jordan Bardella sur le plateau de BFM TV.

L’Algérie a été invitée dans un débat pourtant bien franco-français. Les problèmes de violences policières, de discrimination raciale, d’ignorance de la misère sociale dans laquelle la banlieue française est plongée depuis les années 80, ne peuvent être imputés à l’Algérie. Ces problèmes nationaux sont détournés par l’extrême-droite pour ramener le débat vers un pays qui cristallise symboliquement les peurs et les détestations de la France.

Il est plus facile d’imputer ces problèmes de fond à l’Algérie plutôt que de se questionner sur les raisons des révoltes récurrentes des banlieues françaises.

Le passé franco-algérien ramène constamment l’Algérie au cœur de la politique française, alors que nous sommes plus de 60 ans après l’indépendance algérienne.

L’affaire Nahel est un prétexte comme un autre. La coïncidence a fait que le jeune homme ait des origines algériennes et que l’extrême-droite ait choisi d’accabler Nahel, en pointant du doigt son passé judiciaire inexistant d’ailleurs et la nationalité algérienne de sa mère.

L’actualité française comme algérienne est rythmée par des accros entre les deux pays. On peut notamment évoquer la mini-polémique autour du récent décret présidentiel à propos des conditions d’exécution de l’hymne national algérien Kassaman. Il a été jugé anti-français par une partie de la classe politique et même à « contre-temps » par Catherine Colonna, la ministre française des Affaires étrangères.

Même la politique étrangère de l’Algérie fait l’objet de commentaires en France. Le récent rapprochement entre l’Algérie et la Russie a été largement commenté en France. Le président Abdelmadjid Tebboune a été accueilli en grande pompe à Moscou par Vladimir Poutine en juin alors qu’il devait initialement effectuer une visite d’Etat en France.

Même si la Russie et l’Algérie sont des alliés historiques, côté presse française, on se demande si les Algériens ne prennent pas le risque – volontaire – de perdre la France avec cette alliance. La France a des relations perturbées avec la Russie dans le contexte de la guerre en Ukraine. Sur un autre plan, ces deux pays se posent désormais comme deux concurrents en Afrique où la Russie tente de grignoter de plus en plus d’espace souvent au détriment de la France.

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