Économie

« Notre blé est meilleur que l’américain ou le canadien »

L’entreprise Smid du Tell de Sétif fait partie des entreprises citoyennes. Avec des céréaliers, elle a créé un Réseau qualité blé (RéQuaBlé), qui a permis une amélioration de la production locale tant en qualité qu’en quantité.

Quand Abdelkrim Keraghel, le responsable de Smid du Tell, présente le bilan du réseau RéQuaBlé, il ne manque pas de souligner : “Nous sommes passés de 12 quintaux/hectare en 2011 à une moyenne de 32qx/ha en 2018“. En 2019, il confiait à Reporter DZ que certains agriculteurs arrivent à des pointes de 50 qx/ha en sec.

Un réseau qui réunit les opérateurs locaux

Le réseau concerne 3 000 hectares et 20 % des superficies céréalières de la wilaya de Sétif. Il a été créé suite à la demande du ministre de l’Agriculture. Ce dernier avait invité les membres de la filière “à participer à l’amélioration de la qualité du blé dur de la production nationale“.

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À ses débuts, il comptait une douzaine d’agriculteurs, ce qui correspondait alors à 600 hectares contre aujourd’hui une centaine d’agriculteurs répartis sur une vingtaine de communes. Outre les agriculteurs, le réseau est ouvert aux transformateurs, Coopératives de céréales et de légumes secs (CCLS), chercheurs de l’université et instituts techniques.

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Abdelkrim Keraghel aime souligner les progrès du réseau en matière de qualité : “Grâce à notre coopération avec des chercheurs de l’université de Batna, nous avons pu réaliser pour la première fois des résultats performants en matière de protéine et mitadinage“.

Le mitadinage correspond à une tendance du grain de blé dur à produire de la farine à la place de la semoule. La cause principale revient à une insuffisance de fertilisation azotée.

En tant que propriétaire de moulin, il est chaque jour confronté à ces questions. La qualité du grain est indispensable pour que son moulin puisse fournir une semoule de qualité supérieure.

Ainsi, nous sommes arrivés à 15,5 % de protéines. C’est un très bon résultat. Le taux de protéines est passé de 10 % en 2010 à 14,6 % en 2014. Également, notre réseau a pu réaliser un taux de mitadinage record, soit 0,15 %. Il faut souligner qu’en Algérie, en 2010, le taux de mitadinage dépassait 32 %“.

Ces résultats font dire à ce professionnel, qui a l’habitude de voir passer dans son moulin des blés importés de diverses pays, que “notre blé est meilleur que l’américain et le canadien“.

Cette amélioration de la qualité s’est faite en parallèle avec le rendement. “Notre réseau est passé de 8 qx/ha en 2010 à 24 qx/ha en 2013 et puis 32 qx/ha en 2016“, a-t-il expliqué.

Mais ce qui est le plus admirable, c’est que les agriculteurs aient amélioré la qualité alors que le barème de prix au niveau des CCLS ne valorise pas les blés présentant un meilleur taux de protéines. Or, pour arriver à ce qu’un grain de blé dur soit riche en protéines, il faut lui apporter plus d’engrais azoté, ce qui représente une dépense supplémentaire.

Interrogé sur les difficultés rencontrées, Abdelkrim Keraghel indique que le quota de blé dur attribué au moulin par l’Office algérien des céréales (OAIC) est passé de 70 % à 50 %. Avec les épisodes de sécheresse une partie de la production est réservée à la production de semences, ce qui réduit d’autant plus les quantités dirigées vers le moulin. Aussi confie-t-il, “si on veut produire mieux il faut intéresser les gens“.

 Collaboration avec les universités de Sétif et de Batna

Parmi ses membres, le réseau comprend des chercheurs des universités de Sétif et de Batna. Avec Batna, c’est l’ajustement des apports d’engrais azotés qui a été abordé.

À l’initiative de la chercheuse Nadia Boulelouah, des analyses d’azote du sol ont été effectuées plusieurs années de suite. Cela a permis d’affiner les doses d’engrais à apporter.

Si l’azote permet d’augmenter les rendements, il peut aussi induire des brulures de la plante en cas de sécheresse. D’où la nécessité d’un pilotage assez fin des apports sur la culture. Pour l’agriculteur, la situation est d’autant plus complexe que la quantité d’azote du sol varie selon le type de culture précédent celle du blé.

En absence d’outils adaptés, de nombreux agriculteurs naviguaient à vue. L’originalité de la démarche initiée par l’équipe de l’université de Batna aura consisté à mettre à disposition des agriculteurs une mallette leur permettant de réaliser eux même les précieuses analyses.

Avec l’université de Sétif, la collaboration concerne les pertes de grains à la récolte qui peuvent atteindre jusqu’à 30 % dans certains cas.

RéQuaBlé préfigure des systèmes agricoles territorialisés qui visent la création de pôles d’excellence réunissant les compétences locales et permettant d’améliorer la production de céréales sans forcément recourir à l’irrigation d’appoint.

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