Économie

Pétrole : en 2019, la cohésion de l’Opep va être mise à rude épreuve

Dans son rapport mensuel, l’organisation prévoit que la production de ses 15 pays membres devra baisser pour s’ajuster à une demande mondiale en légère hausse, largement couverte par les extractions des pays concurrents, notamment les Etats-Unis. Mais la politique à suivre pour l’Opep en cas d’une meilleure croissance économique mondiale ou d’une chute des exportations de l’Iran risque de diviser ses membres.

Dans son dernier rapport mensuel publié ce mercredi, l’Opep a calculé que ses 15 pays membres devraient produire 32,18 millions de barils par jour (mbj) l’an prochain, soit 760.000 barils par jour de moins que cette année, pour s’ajuster à une demande mondiale d’or noir qui sera certes en augmentation – elle devrait franchir le seuil des 100 mbj, à 100,3 mbj, soit une hausse de 1,45 mbj par rapport à 2018 -, mais une augmentation qui sera plus que compensée par les pays concurrents du cartel, qui verront leur production majorée de 2,1 mbj, soit la plus importante progression depuis 2014. La production pétrolière américaine est la principale contributrice, avec une part représentant trois quart de cette augmentation.

Les estimations des experts de l’Opep se fondent sur une croissance économique mondiale qui ralentira en 2019, à 3,6% contre 3,8% en 2018. Or, le marché pourrait connaître certaines évolutions.

Inquiétude de Donald Trump

La première est celle d’une révision à la hausse de l’activité économique qui se traduirait par une augmentation de la demande pétrolière. Or seule l’Opep, en particulier l’Arabie saoudite, serait en capacité de fournir des barils supplémentaires pour contenir une flambée des prix, débouchant sur un “choc pétrolier” préjudiciable aux économies de la planète.

C’est ce dont s’inquiète Donald Trump. Le président américain martèle qu’il veut une hausse de l’offre aujourd’hui pour calmer des prix qui ont déjà largement progressé depuis un an, avoisinant désormais les 80 dollars, pour le baril de Brent de la mer du Nord, un niveau inédit depuis presque trois ans. Donald Trump y est d’autant plus sensible, qu’avec les élections de mi-mandat avant la fin de l’année, il redoute que son électorat, notamment populaire, lui fasse payer dans les urnes un prix de l’essence à la pompe qui aujourd’hui est au plus haut depuis 4 ans.

Pour autant, selon son rapport, l’Opep n’a pas attendu les appels du président américain. Ainsi, en juin, sa production a augmenté de 173.000 bpj à 32,33 mbj. Un niveau qui la situe à 150.000 barils par jour au-dessus de son offre prévue pour l’an prochain. Si le cartel continuait à pomper au même rythme le marché se retrouverait légèrement excédentaire l’année prochaine.

Hausse de la production saoudienne

C’est surtout l’Arabie saoudite qui a vendu davantage de brut pour répondre à la demande de certains pays consommateurs. En juin, ses extractions s’affichaient à  10,42 mbj. Elle a ainsi compensé certains déficits de production d’autres pays comme le Venezuela et la Libye.

La deuxième évolution, géopolitique, concerne l’Iran. Donald Trump a répété qu’il voulait un changement de régime à Téhéran, qui doit faire face à une contestation croissante de l’ensemble de la population en raison de la détérioration de la situation économique.

Les sanctions que les Etats-Unis vont imposer au pays à partir du 6 août pourraient s’avérer fatales pour le régime, d’autant que le président américain a clairement affirmé qu’il voulait réduire les exportations iraniennes à 0.

Les stocks éviteront une pénurie à court terme

Ce qui pose une problème à l’économie mondiale. L’Iran, selon l’Agence internationale de l’énergie, a pompé en mai 3,82 mbj. Le retrait rapide d’un tel volume de pétrole ne pourrait pas être compensé (même si les stocks détenus par nombre de pays permettraient d’éviter une pénurie à court terme), et surtout entraînerait une flambée des prix.

Sans compter que l’Iran et d’autres pays comme le Venezuela  refusent que les autres membres de l’Opep récupèrent leur quota de production, une répartition de la production qui est la pierre d’angle du bon fonctionnement de l’organisation.

Il n’est donc pas exclu que l’on assiste sinon à l’éclatement de l’organisation du moins à une clarification qui entraînerait le départ de certains de ses membres.


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