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Rails dans le désert : le nouveau défi que l’Algérie veut relever

Rails dans le désert : le nouveau défi que l’Algérie veut relever

L’Algérie, pays-continent, veut faire parvenir le rail, vecteur de développement, jusqu’aux confins de son immense territoire, en grande partie désertique.

Un énorme défi autant technique que financier que le pays veut relever dans les prochaines années. Les premiers chantiers sont d’ores et déjà lancés, avec le concours des Chinois qui ont une grande expertise dans la réalisation des voies ferrées dans le désert.

Proportionnellement à l’immensité de son territoire (2,38 millions de kilomètres carrés), le réseau ferroviaire de l’Algérie n’est pas très dense.

Il est porté grâce aux investissements consentis ces dernières décennies à quelque 6300 kilomètres, reliant essentiellement les principales villes de la bande côtière et certaines villes de l’intérieur.

À l’indépendance, en 1962, l’Algérie avait hérité d’environ 5.000 kilomètres de chemins de fer, dont une partie sera perdue, désaffectée ou engloutie par les sables du désert.

Après plusieurs années de petits investissements dans la réalisation de lignes entre des villes rapprochées, l’Algérie a décidé de mettre le paquet et de lancer enfin la bataille du rail.

D’abord dans les années 2000, le lancement des projets de modernisation et d’extension des lignes ferroviaires situées dans le nord du pays, et la construction de la rocade des Hauts-Plateaux pour relier par le rail plusieurs villes dans cette vaste région du pays.

Après un arrêt dû à la crise économique qui a suivi la baisse des prix du pétrole en 2014, l’Algérie a repris ses projets dans le ferroviaire.

En août 2023, le président de la République Abdelmadjid Tebboune a annoncé un ambitieux projet de réalisation de 6.000 kilomètres de rails, traversant le pays de l’est à l’ouest et du nord au sud.

Même le raccordement au réseau national de la ville de Tamanrasset, à 2000 kilomètres au sud d’Alger, n’est plus une idée utopique mais un projet sérieusement envisagé.

Le train est déjà presque à mi-chemin entre les deux extrémités verticales du pays, avec la réalisation de la ligne entre Touggourt et la ville pétrolière de Hassi Messaoud, sur 150 kilomètres.

Le gros des investissements ferroviaires envisagés par l’Algérie se fera dans les zones du grand sud ou semi-désertiques, avec la boucle des Hauts-Plateaux et la grande pénétrante verticale nord-sud parallèle à la route Transsaharienne.

Le train dans le désert n’est pas tout à fait une nouveauté en Algérie qui comptait, avant l’indépendance déjà, trois lignes pénétrantes verticales : Oran-Béchar sur 648 kilomètres, Ain M’lila – Touggourt (410 km) et Boughezoul – Laghouat (250 km). Plusieurs de ces lignes sont en extension.

La ligne Oran-Béchar, réalisée en 1906, a été fermée dans les années 1980 avant d’être restaurée, étendue et rouverte en 2010.

Depuis fin novembre dernier, les travaux de son extension vers Tindouf ont été lancés en grande pompe, en présence du président de la République. C’est l’exploitation enfin décidée du méga-gisement de fer de Gara Djebilet, l’un des plus grands au monde, qui a dicté la réalisation de cette ligne ferroviaire qui transportera notamment le minerai de Tindouf vers les usines de traitement à Béchar.

Rails dans le désert algérien : ce que peuvent apporter les Chinois

Le projet de 575 kilomètres est confié à China Railway Construction Corporation (CRCC) qui travaillera avec l’entreprise publique algérienne Cosider. Le montant du contrat n’a pas été dévoilé, mais dans la Loi de finances rectificative 2023, le gouvernement a réservé la somme de 430 milliards de dinars (trois milliards de dollars) pour la construction de cette ligne ferroviaire.

L’octroi aux Chinois de ce projet, comme très probablement tous les autres à venir comme annoncé en août dernier, n’est pas seulement dû à la bonne entente politique et aux liens économiques étroits entre les deux pays.

Il se trouve en fait que la réalisation de rails dans le désert est techniquement très compliquée et les Chinois sont des champions dans le domaine.

Début janvier, le site spécialisé railjournal.com rapportait que CRCC apportera pour le projet de la ligne Tindouf – Béchar une précieuse expertise et un savoir-faire avéré dans la pose de lignes de chemins de fer en milieu désertique.

Pour mener à bien le projet, l’entreprise chinoise utilisera les dernières technologies issues de la recherche scientifique dans le domaine, afin de « contrôler le mouvement du sable et la formation de dépôts ».

La réalisation de rails dans le désert algérien est en effet non seulement un défi financier et économique à cause de la longueur des distances et du souci de rentabilité future, mais aussi un challenge technique qui nécessite une très grande maîtrise. Des surcoûts devraient logiquement être induits par rapport au prix du kilomètre de rail dans les régions nord.

Outre le fait de travailler dans des conditions climatiques extrêmes, des problèmes risquent de se poser au rail après les travaux et pour l’exploitation des trains, à cause notamment des vents forts, des tempêtes de sable et des très fortes chaleurs qui déforment les rails et empêchent la circulation des trains.

La géologie du Sahara faite de longues étendues de sable en mouvement reste cependant l’obstacle majeur. L’exemple de la ligne Béchar – Oran qui souffre de l’ensablement rappelle qu’il n’est pas facile d’exploiter d’une façon optimale un chemin de fer dans le désert.

Des ingénieurs algériens sont parfois sceptiques quant à la viabilité d’un tel projet en Algérie qui manque cruellement d’ingénierie dans le domaine de la construction et de l’exploitation des chemins de fer dans le désert.

Tout ceci nécessite des matériaux adaptés et des techniques de réalisation très élaborées.

Les Chinois justement ne sont pas novices en la matière. En juin 2022, ils ont achevé le dernier tronçon de la plus grande boucle ferroviaire de désert au monde, longue de 2712 kilomètres.

Ce chemin de fer ceinture désormais le plus grand désert de Chine, le Taklamakan, dans la province du Xinjiang. Une année et demie après l’ouverture du dernier arc de la boucle, les effets sur le tourisme et le dynamisme économique de la région de ce projet pharaonique commencent à se faire sentir.

Mais pour le réaliser, il a fallu lever plus d’une contrainte technique. La plus problématique a été le contrôle des mouvements du sable.

Selon le journal chinois, Le Quotidien du peuple, les ingénieurs de l’ex-Empire du milieu, ont combiné l’ingénierie et la plantation d’arbres pour la protection du tracé. « L’ingénierie de pré-protection du contrôle du sable donne un temps suffisant aux plantes pour pousser, et progressivement, ce corridor vert à travers le désert du Taklamakan prend forme », explique le journal chinois.

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