Économie

Blé : récoltes précoces en Algérie

Les moissons de blé ont commencé en Algérie qui fait face cette année à la sécheresse. Déjà le sud engrange les premiers quintaux de blé après la récolte de l’orge.

Des moissons qui prennent des aspects bien différents selon les régions. Plongée dans l’Algérie dont l’année est marquée par des récoltes précoces de blé.

La récolte se passe dans un champ de blé. Pas de doute, l’absence de barbes sur les épis indique du blé tendre. Dans le champ, la végétation est dense et les épis serrés les uns contre les autres. C’est l’aspect typique d’un champ des plaines de la Beauce, cette grande région céréalière du bassin parisien.

Pourtant, cette parcelle se situe bien loin de ces contrées généreusement arrosées par la pluie puisqu’il s’agit des Nemmemchas au sud de la wilaya de Khenchela, dans l’est de l’Algérie. Une vaste région steppique qui, depuis quelques années, s’est couverte de pivots d’irrigation.

La moissonneuse-batteuse se rapproche. Pas de doute, la marque « Sampo » écrite en grosses lettres confirme qu’on est bien en Algérie. En ce mois d’avril, c’est Rebia Oucif qui témoigne sur les réseaux sociaux de cette spectaculaire moisson. Une moisson dont le rendement prévisible devrait dépasser les 60 quintaux par hectare.

Il s’agit de semences de reproduction, de la R1 dans le jargon des semenciers. Des quintaux qui devraient servir de semences l’année prochaine. Les techniciens du Centre National de Contrôle et de Certification (CNCC) ont contrôlé la parcelle et celle-ci a été déclarée conforme selon le cahier de charges et bonne à être récoltée.

Ni oued, ni barrage ni eau qui tombe du ciel

Autre récolte précoce, cette fois-ci une parcelle de blé à Relizane. Contrairement au champ précédent, tout indique une parcelle sinistrée. En fait d’épis, ce sont surtout des panicules de folle-avoine qui dominent.

Des plants d’une vingtaine de centimètres contre une hauteur triple attendue. Point de moissonneuse-batteuse dans le champ, mais un tracteur qui tire sur le côté une faucheuse. En passant, la lame munie de couteaux coupe les frêles tiges qui s’abattent sur le sol.

Debout dans le champ, Abdelkader observe les allées et venues du tracteur. Il confie à Ennahar TV : « Pour celui qui n’a pas pu irriguer, il n’y a rien cette année. Aucune production de blé. Ceux qui peuvent réaliser une fauche pour récupérer des bottes de paille et ceux qui n’y arrivent pas, car la végétation est trop courte, ils la louent à des éleveurs de moutons comme pâture. »

Pour cet agriculteur, « le plus important c’est l’eau. S’il n’y a pas de pluie, il n’y a rien. » Découragé, il ajoute : « Ici, personne n’irrigue. Il n’y a ni oued, ni barrage ni eau qui tombe du ciel. »

Inquiet, il ajoute : « J’ai peur que cela se reproduise l’année prochaine, que je fasse des frais et qu’au moment de la récolte à nouveau je ne puisse récupérer ni grains ni bottes de paille. »

Puis, il se projette dans les semaines et mois à venir : « Le prix de la botte de paille va atteindre 1.000 DA alors que l’an passé elle ne faisait que la moitié. »

Prêts bancaires et semences

Jusque-là, les services agricoles ont misé sur les semences certifiées, les engrais et l’irrigation. Rien ou très peu n’a été fait en matière de recherche-développement pour moderniser l’aridoculture ou dry-farming, cette culture non-irriguée des céréales qui pourtant prospère ailleurs comme en Australie. Comme à Relizane, de nombreux agriculteurs algériens ne peuvent irriguer les céréales et sans vulgarisation des nouvelles techniques de dry-farming, ils sont à terme condamnés.

Pour la saison agricole prochaine, sans prêt bancaire de nombreux agriculteurs ne pourront pas relancer un nouveau cycle de culture. Quant aux semences pour la prochaine saison, comme le fait remarquer un professionnel, ce sont les wilayas du nord du pays et celles de l’extrême sud qui avec leurs récoltes précoces devront approvisionner les wilayas du centre.

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