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ENTRETIEN. Le Pr Mahyaoui appelle les Algériens à utiliser 2 armes anti-covid

ENTRETIEN. Le Pr Mahyaoui appelle les Algériens à utiliser 2 armes anti-covid

Pr Riad Mahyaoui, membre du Comité scientifique

Le Pr Riad Mahyaoui, membre du Comité scientifique, revient dans cet entretien sur la situation sanitaire liée à la pandémie de covid-19 en Algérie.

Selon lui, la sortie du tunnel dépend du degré de respect et d’application des mesures barrières et de l’adhésion à la vaccination. Il appelle les Algériens à utiliser les deux armes efficaces contre le covid-19.

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Quelle est votre lecture de la situation épidémiologique en Algérie ?

Elle est stable. On est au 6e jour de la tendance baissière des contaminations. On s’en réjouit et on espère que ça va continuer à descendre. Même dans les hôpitaux, il y a moins de pression.

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Cependant, il ne faut pas crier victoire, ne pas se relâcher. Il faut toujours rester prudent et rigoureux quant à l’application des mesures barrières. Et surtout il faut relancer la vaccination contre le covid-19.

La pression a-t-elle baissé dans les services de réanimation des hôpitaux ? 

Effectivement. Pendant la période actuelle il y a moins de recours à la réanimation. Sur le plan des hospitalisations et malgré le rebond épidémique qu’on a observé ces derniers jours avec un pic à plus de  2 500 cas covid (mardi 25 janvier), le taux des hospitalisations n’a pas explosé.

Comment expliquez-vous la baisse des contaminations au covid-19 ?

Je pense que c’est la vague Omicron qui a fait que la contamination a été ultra rapide, elle s’est étendue à tout le monde dans tous les secteurs. Y compris dans la santé où les contaminations ont été très rapides, et massives.

Dans l’hôpital où je travaille (CNMS, ndlr) on a dépassé 50 % de personnels atteints. Aujourd’hui, on a récupéré pratiquement 80 % des personnes contaminées.

L’Algérie a-t-elle atteint le pic de contaminations au covid-19 ?

Actuellement il y a une décrue, après le pic des 2 500 cas. Il faut attendre une semaine et ensuite consolider à 15 jours (une semaine de glissement plus 15 jours). Et si pendant cette semaine les chiffres ne remontent pas, et que cela se confirme dans les 15 jours, on pourrait dire qu’on a dépassé le pic.

Quelle est la période d’isolement pour une personne atteinte du covid, avant la reprise du travail ?  

C’est 10 jours de traitements et d’isolement pour les cas positifs avec des symptômes. On a remarqué que chez une personne qui n’est pas âgée et ne souffrant pas de comorbidités, les symptômes ne durent pas plus de 48 h à 72 h.

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La personne reste sous traitement et à l’isolement pendant 10 jours comme édicté dans les instructions. Les cas contacts sont isolés 5 jours et s’ils n’y a rien, ils reprennent le travail.

Avec Omicron, on a constaté qu’il y a une symptomatologie différente. Qu’en est-il au juste ?

Les signes sont la toux, la fièvre et le mal de gorge ainsi que la fatigue. Ce sont des infections dans la sphère ORL mais qui n’atteignent pas trop le poumon et ne le détériorent pas. C’est pourquoi on n’a pas de problème d’oxygène. On ne voit pas beaucoup de malades entrer en réanimation.

Quel est le traitement préconisé lorsqu’on a tous ces symptômes ?   

Il s’agit d’un traitement classique avec un recours à la vitaminothérapie (zinc, vitamine C) et le Paracétamol. J’en appelle aux médecins pour ne pas faire des ordonnances standard : un malade peut avoir besoin d’un antibiotique, untel autre n’en peut-être pas besoin.

Des pharmaciens me signalent qu’ils reçoivent des ordonnances avec 2 ou 3 antibiotiques alors que le patient vient sur ses pieds et n’a pas d’infection ou de surinfection rajoutée au covid-19.

Pareil pour les anticoagulants, les instructions sont claires : ce ne sont pas tous les gens qui doivent recevoir des anticoagulants. Allégeons le traitement contre le covid-19 en prescrivant des ordonnances au cas par cas.

C’est ce type de prescriptions qui a peut-être provoqué de fortes tensions sur les médicaments. Par exemple, l’anticoagulant Lovenox est difficile à trouver ? 

Bien sûr. Il est à signaler que beaucoup de gens font de l’automédication, ce qui est très nocif. Un anticoagulant n’est pas un traitement anodin, on ne peut pas le prescrire à tort et à travers, car ça peut provoquer des complications et des hémorragies graves.

J’en appelle au bon sens des uns et des autres pour lutter contre cette automédication et cette utilisation large, abusive et irraisonnable des antibiotiques.

À la faveur de cette décrue, faut-il encore rappeler l’importance de respecter les mesures barrières et à se faire vacciner…

Je dirai que même si l’on est vacciné on doit se protéger. Si l’on veut sortir de cette situation il faut se protéger. La protection reste la première barrière contre le covid-19 et ses variants.

La deuxième arme, qui n’existait pas il y a deux ans, c’est le vaccin dont on a des millions de doses en stock à l’Institut Pasteur d’Algérie. Il faut les utiliser.

J’en appelle aussi aux personnes ayant reçu deux doses d’en faire la troisième dose surtout si elles sont âgées ou avec des comorbidités. Toutes les études montrent que 84 % des malades qui décèdent en réanimation ne sont pas vaccinées.

L’Institut Pasteur d’Algérie a annoncé dimanche 30 janvier des cas du « petit-frère » d’Omicron, le sous variant BA.2. Faut-il s’inquiéter ?

En fait, l’Omicron a trois « frères ». Il a largement sévi en Inde et ensuite au Danemark qui a été surpris par la rapidité de la contamination. Il se trouve que le BA.2 n’est pas très virulent mais reste très contagieux. Il ne présente pas de gros risques sur le système respiratoire.

L’Algérie est à moins de 15 % de taux de vaccination rapporté à la population générale, de l’aveu même du ministre de la Santé. Pourquoi ce taux faible ?

De toute manière, on est loin du compte. À savoir de l’objectif qu’on s’est fixé au début de la vaccination (vacciner 70 % de la population en 2021). Cela peut favoriser l’apparition de nouveaux variants. L’objectif numéro 1  c’est comment sensibiliser et convaincre et relancer la campagne vaccinale. Le paquet doit être mis sur ces aspects-là.

Mais sur le terrain, tout cela a du mal à se concrétiser. Pourquoi ?

Au Comité scientifique on essaie de trouver la formule magique et ce en accentuant le matraquage médiatique. Il faut dire aussi que des contaminations ont eu lieu également dans le secteur de la santé dont certains professionnels ne sont pas vaccinés. Pareil dans l’éducation.

Si les parents sont vaccinés, l’enfant est lui protégé à 71 %, si c’est l’un d’eux c’est 50 %. C’est pour dire que si on veut protéger son environnement, les écoles, les crèches, les universités, etc., il faut que les personnels soient vaccinés.

En dehors de la fermeture des écoles, pourquoi ce défaut de rigueur dans l’application des mesures comme le passe vaccinal ?

La manière d’inciter des gens à se faire vacciner c’est le passe vaccinal. Il devrait être appliqué dans tous les secteurs et de façon rigoureuse. Il faut qu’il y ait de la rigueur dans l’application du passe vaccinal dans tous les secteurs.

Avec l’arrivée du sous-variant BA.2, y aura-t-il des mesures concernant les frontières ?

Non. Tout retour vers les confinements et la fermeture des frontières n’est plus à l’ordre du jour. Il n’en est plus question parce que le virus circule partout ailleurs dans le monde. On ne va donc pas prendre des mesures dans ce sens. Le dispositif sanitaire aux frontières est, lui, maintenu et renforcé.

 

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