Économie

Algérie : ces « barrières artificielles » qui freinent le tourisme

La relance du tourisme en Algérie est une autre Arlésienne dont on parle beaucoup sans jamais la voir. Le pays dispose de potentialités énormes mais manque de stratégie pour les exploiter.

L’activité du ministère, de ses démembrements et des différents offices dédiés au secteur se limite presque à préparer chaque année la saison estivale qui elle-même se réduit au déplacement des Algériens vers les plages le temps d’un week-end ou au mieux pour un séjour dans un hôtel ou un camping de quelques jours.

L’activité touristique proprement dite, c’est-à-dire l’afflux des nationaux et surtout des étrangers sur les monuments historiques, les vieilles villes, les stations balnéaires, les oasis ou les stations de montagne, est réduite à sa plus simple expression.

On parle de deux à trois millions de touristes par an, 500 000 pendant la période de Covid, mais la majorité sont des nationaux résidant à l’étranger et qui viennent pour des vacances au pays.

Il s’agit plus de visites familiales que de tourisme. L’Algérie reçoit en tout cas nettement moins de touristes que ses voisins immédiats pour lesquels le tourisme constitue un secteur clé de l’économie.

Le Maroc reçoit près de 12 millions de touristes par an et réalise des recettes annuelles d’environ 60 milliards de dirhams (5,6 milliards d’euros), soit 8 à 10% de son PIB.

En Tunisie, visitée par environ 9 millions de touristes, le secteur emploie 100 000 personnes directement et 290 000 indirectement et contribue à hauteur de 14% du PIB.

L’Algérie ne dispose pas de chiffres précis concernant l’économie du secteur. Il y a néanmoins un indicateur qui ne trompe pas : les instances internationales spécialisées ne la mettent pas dans le top 100 des destinations touristiques mondiales.

Pour un pays qui a la plus grande superficie d’Afrique, 1200 kilomètres de côtes sur la Méditerranée, la mer la plus tempérée au monde, les vestiges de 10 000 ans d’histoire, il y a forcément un problème.

Les atouts touristiques de l’Algérie sont innombrables : monuments, gravures rupestres, théâtres romains, ksour, oasis, montagnes enneigées une partie de l’année, plages, vieilles villes, diversité culturelle, gastronomie.

La cuisine algérienne vient tout juste d’être classée 26e au monde par un organisme international, devançant celles des autres pays du Maghreb et du monde arabe et presque toutes les gastronomies d’Afrique.

Aberration

Même les infrastructures d’accueil existent. Les dernières statistiques font état d’un parc hôtelier de 140 000 lits. Le pays est aussi doté d’aéroports, de ports et d’un réseau routier parmi les plus denses et les plus modernes en Afrique.

Dans leur quête de diversifier l’économie, les autorités algériennes tiennent dans le tourisme un secteur prêt à l’exploitation et dont les dividendes peuvent donc être immédiats. Il n’y a rien à créer, ni presque rien à investir.

Mais la part rachitique du tourisme dans l’économie ne bouge pas année après année, malgré les promesses et les annonces en grande pompe.

« Le pays est immense, certainement, le 10e plus grand au monde par sa superficie. Mais aussi il est obscur, caché derrière des barrières à la fois géographiques et artificielles », résume un journaliste du Washington Post qui a réalisé un reportage sur l’Algérie.

Ces barrières sont même plus « artificielles » que « géographiques ». Les professionnels du secteur et autres spécialistes s’accordent à pointer d’abord un déficit de valorisation de la destination Algérie.

Autrement dit, très peu d’efforts sont consentis pour la faire connaître. Sur les réseaux sociaux, les vidéos faisant l’éloge ou  décrivant les atouts du pays sont de plus en plus nombreuses depuis quelques années.

Elles sont le plus souvent l’œuvre de créateurs de contenus ou de simples touristes de retour d’Algérie et émerveillés par ce qu’ils ont vu ou goûté.

Les instances dont la mission est de faire connaître la destination font très peu dans ce sens. Néanmoins, il ne suffit pas d’être au courant de la destination et de vouloir s’y rendre.

Il faut aussi pouvoir y aller. Car l’autre barrière, réellement artificielle, c’est la difficulté pour les touristes étrangers d’obtenir un visa d’entrée pour l’Algérie, en plus de la cherté des billets d’avion.

Une aberration pour un pays qui, officiellement, cherche à développer son tourisme. Le témoignage récent d’un youtubeur égyptien, venu pourtant contribuer à faire connaître les atouts de l’Algérie à ses concitoyens et à ses followers dans le monde arabe, est édifiant.

Obtenir un visa pour l’Algérie est quasiment une mission impossible, regrette-t-il, au moment où son pays, destination touristique mondiale par excellence, accorde le visa aux Algériens « entre 48h et 5 jours ».

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