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ENTRETIEN. Gestion du covid, frontières : le coup de gueule du Pr Bouzid

ENTRETIEN. Gestion du covid, frontières : le coup de gueule du Pr Bouzid

Pr Kamel Bouzid, chef du service oncologie au CPMC d’Alger

Le Pr Kamel Bouzid, chef du service oncologie au CPMC d’Alger, pousse un nouveau coup de gueule sur la gestion du covid-19 en Algérie. Il délivre quatre messages aux autorités et dénonce les deux poids, deux mesures dans la fermeture des frontières.

Quelle est la situation épidémiologique liée au covid-19 en Algérie ?

Il me semble qu’il y a des messages importants à renouveler. Le premier est sur le bilan du ministère de la Santé, cette notion de « guérisons ».

Compte tenu de ce qu’on sait du covid, il faut impérativement, pour que la population ne lève pas la garde, arrêter cette histoire de « guérisons ». Dans les bilans, celui qui dit guérisons s’avance pour beaucoup.

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Pourquoi ?

Parce qu’il y a des manifestations de cette maladie, qui existe maintenant depuis seize mois, qui apparaissent et qu’on ne connaissait pas au début.

Des manifestations aiguës et surtout des manifestations chroniques, notamment neurologiques, psychiatriques, digestives, etc. Si on dit aux gens qu’ils sont guéris, on baisse la garde. Or on est en train de répéter attention aux gestes barrières, etc.

Deuxième message parmi les gestes barrières, il y en a un sur lequel on n’a pas assez insisté, c’est le lavage des mains avec de l’eau savonneuse ou avec des solutions hydroalcooliques.

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Le message sur la bavette est connu et il faut rajouter une couche dans la communication sur le lavage régulier des mains.

Enfin, troisième message : il faut impérativement, quel que soit le nombre, donner le nombre d’Algériens qui ont été vaccinés. On ne demande pas les noms, prénoms et adresses. On demande le nombre d’Algériens vaccinés, et ce bilan doit être donné tous les jours.

Tous les pays du monde le font, et parce que je ne suis pas méchant je ne vais pas citer les pays. Pourquoi on ne donne pas le nombre de gens vaccinés au lieu de nous dire qu’on a reçu 800 000 doses, 60, 40, etc. ?

Ces trois messages  pour redonner de la crédibilité à la politique des autorités concernant l’épidémie de covid et pour gagner en sensibilisation pour la population.

Enfin, quatrième message : moi, personnellement, je suis incompétent en matière de covid. Tout médecin que je suis, je connais ce que connaissent mes concitoyens qui prennent la peine de se documenter, que ce soit sur les réseaux sociaux ou dans la presse.

Je souhaiterais qu’il y ait un seul interlocuteur entre les autorités et la population, désigné par la plus haute autorité du pays, le président de la République, parmi les membres du Conseil scientifique.

Il faut qu’il y ait une seule voix qui parle, parce que quand on écoute beaucoup de voix, on ne fait plus confiance. On est dans la situation de l’appel au loup.

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Le pire, il y a quelques jours, mon collègue le professeur Zidouni a tiré la sonnette d’alarme. Nos compatriotes algériens sont séquestrés à l’étranger, puis on apprend qu’il y a un Indien qui est parti et revenu, il a ramené le covid (variant indien) à Tipaza, il n’y a eu ni quarantaine, ni rien du tout, est-ce qu’on lui a même fait la PCR ?

Enfin, le dernier point concerne les PCR. Il faut être sûr qu’elles sont réelles, puisqu’il y a un trafic de fausses PCR qui est en train de se faire. En France, on l’a vu et ça va commencer en Algérie.

L’histoire de l’Indien est significative de l’échec lamentable de la gestion de ce dossier. Des Algériens ne peuvent pas rentrer en Algérie et celui-là, sous prétexte qu’il est employé je ne sais où, il part et il revient ! Il est parti de Delhi, il a fait escale à Dubaï, il a débarqué à Tipaza et contaminé des gens. Evidemment, si cet Indien a fait ça, les Chinois aussi.

Donc à quoi ça sert qu’on séquestre nos compatriotes et qu’on leur interdise de rentrer dans leur pays si on autorise des étrangers à rentrer ?

Etes-vous pour l’ouverture des frontières ?

Je suis pour l’ouverture, sous réserve de conditions sanitaires acceptables et qu’elles soient respectées.

On est dans un pays où contourner la loi est un art. Je vous parlais des fausses PCR. Vous apprenez comme ça incidemment il y a trois jours qu’à Bel Abbes, un greffier de justice a délivré 22 faux certificats de fausse nationalité à des Marocains.

Alors quand on dit « ouverture des frontières, sous réserve de », il faut appliquer les réserves. Or, tout le monde sait qu’il y en a qui partent et qui viennent et qu’il y a d’autres qui sont bloqués ici.

Puis, cette histoire d’autorisation est de la folie furieuse. C’est la porte ouverte à toute la corruption et à tout clientélisme.

J’ai des patients qui devaient être évacués pour des raisons graves. On leur demande de ramener une autorisation du ministère de l’Intérieur. Mais on est fou là ? On demande l’autorisation de rentrer dans notre pays ?

Demain, vous allez à Tizi Ouzou, on va vous demander un passeport intérieur comme dans l’ex-Union soviétique. Cette autorisation est de la folie furieuse. C’est de la bureaucratie instituée en système.

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