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Ramadan : peut-on faire confiance aux épices qui proviennent de Maghnia ?

Ramadan : peut-on faire confiance aux épices qui proviennent de Maghnia ?

Durant le Ramadan, qui a commencé ce samedi, les épices figurent parmi les produits alimentaires les plus prisés par les Algériens. Mais peut-on vraiment faire confiance à toutes ces épices vendues dans les commerces ?

À Maghnia, à l’extrême ouest du pays, le marché appelé communément Souk Tléta, grouille de monde tous les mardis et vendredis. C’est sans doute le plus grand marché des épices du pays. Les clients viennent de plusieurs wilayas pour faire leurs achats notamment en épices.

« Je viens ici régulièrement pour approvisionner mon magasin. Ce marché offre le meilleur rapport qualité/prix« , confie Ahmed commerçant venu de Tipaza. « J’aime bien ce marché. Pour 400 dinars j’ai acheté de la Karwiya, du Cumin, du Skindjbir et du Ras El Hanout (mélange d’épices), soit de quoi couvrir tous les besoins en condiments de ma famille durant le Ramadan. Ce sont des produits d’excellente qualité et cédés environ à moitié prix par rapport à Oran où j’habite », témoigne une cliente.

Beaucoup d’épices vendues dans ce marché sont issues des quatre coins du monde. Elles transitent souvent via le Maroc voisin pour finalement arriver à Maghnia. Une partie est importée directement par des opérateurs algériens. L’Algérie compte 177 opérateurs versés dans l’importation d’épices qui proviennent du Sri Lanka, de Chine, de Côte d’Ivoire, de Jamaïque, des Antilles, du Soudan, d’Inde, de Malaisie, de Tanzanie et enfin du Japon.

« Nous avons toutes les épices nécessaires pour les préparations, par exemple, de la Hrira, du Berkoukes, du Kabab, des frites, du poulet, des tadjines et bien d’autres plats« , explique un commerçant qui tient un stand dans ce marché. « Nous avons tout ce qu’il faut. Nos Karwiya et Cumin viennent d’Iran, de Syrie, d’Égypte et de Jordanie. Nos Skindjbir et Karkab sont originaires d’Inde et d’Indonésie. D’autres épices sont importées du Mexique et de la Jamaïque. Le poivre noir est issu d’Amérique latine et d’Afrique du Sud. Nous les importons en grains et nous les moulons ici, ce qui est une garantie de pureté. Nous ne les mélangeons jamais avec d’autres ingrédients comme d’autres le font. Nous ne trichons pas », jure ce commerçant.

Face à ces assurances, le consommateur peut-il vraiment faire confiance à ces épices vendues dans un marché où le vrac et l’informel ont une réelle emprise sur cette filière ?

À Maghnia, les épices sont vendues en vrac. Il n’y a ni étiquette ni traçabilité. Et d’ailleurs plusieurs questions s’imposent : comment expliquer le fait que le piment moulu est proposé à un prix beaucoup moins cher que le même produit séché ? Pourquoi le cumin en poudre est-il moins cher que le même produit granulé ?

« La fraude consiste à remplacer une partie de l’épice par une substance moins chère et difficilement détectable. Une manipulation frauduleuse indétectable lorsque le produit est réduit en poudre. Au poivre on ajoute soit du son, de la farine, du sel et du sorgho, de l’amidon, ou encore des noyaux d’olive moulus qui donnent plus de poids avant de procéder à leur coloration« , révèle un commerçant. Bien sûr, lui, il jure qu’il ne s’adonne pas à ce trafic. « Moi, je n’ai jamais recouru à de tels procédés frauduleux« , tente-t-il de rassurer.

« La cannelle est mélangée avec du liège. Le gingembre est mêlé avec la féverole. Le cumin est mélangé avec de la coriandre ou avec du curcuma. Le safran est parfois mélangé à de la brique pilée ou pire à des cheveux. Les filaments peuvent avoir été trempés dans du sucre liquéfié pour les alourdir ou mélangés à des filaments en plastique. Les fraudeurs mélangent souvent à leurs épices des matières peu coûteuses, comme de la farine, de la craie ou même du bran de scie, pour en augmenter la quantité », poursuit-il. « Pour éviter les fraudes, j’achète les épices entières et je les mouds moi-même« , insiste le même commerçant.

En Algérie, les épices sont-elles contrôlées ? Obéissent-elles à des normes sanitaires ? « Le contrôle des laboratoires ne concerne que les produits emballés et dont les marques sont bien identifiées. Ce qui est loin d’être le cas de la majorité des épices vendues dans les commerces. Il est difficile de procéder à des saisies de lots d’épices pour le motif de fraude. Pendant qu’on détecte une tricherie, une autre technique frauduleuse sort au grand jour », admet un fonctionnaire d’une Direction de commerce qui a préféré requérir l’anonymat.

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