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Arnaques sur les réseaux sociaux : témoignages de victimes

Arnaques sur les réseaux sociaux : témoignages de victimes

Les réseaux sociaux sont devenus un redoutable moyen pour les gens malintentionnés et les escrocs d’atteindre leurs proies plus facilement. Grâce au Web, la communication est plus facile, mais l’arnaque aussi. Témoignages.

De mariage à arnaque…

Samia* verrouille son téléphone après avoir laissé son avis sur un sujet d’actualité sur Facebook. Quelques minutes plus tard, celui-ci vibre : c’est une notification qui lui signale que quelqu’un a répondu à son commentaire.

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Il n’en faudra pas plus pour que la jeune femme entame une longue conversation avec l’auteur de la réponse, Jacem*, d’abord en commentaires, puis en messages privés. Leurs discussions iront en s’allongeant et Samia découvrira une personne ambitieuse.

Le jeune homme avec qui elle parle depuis un mois se présente comme un homme d’affaires plutôt bien loti. Au fil des jours, elle découvre qu’il possède plusieurs voitures et des appartements à Dubaï, d’où il est originaire, mais aussi dans des pays européens.

Samia ne le croit pas au départ, malgré les nombreuses photos qu’il a sur son profil Facebook qui prouvent qu’il possède réellement tout ce dont il lui parle. Mais, à force de lui envoyer quotidiennement des photos et vidéos en direct, la jeune femme finit par baisser garde.

Un mois et demi après leur rencontre sur Internet, au détour d’une conversation, le jeune homme lui propose une opportunité de travailler avec lui. Samia est sceptique mais intriguée.

« Ce que je te propose, c’est d’investir avec nous, depuis l’Algérie. On cherche à élargir notre réseau en Afrique du Nord et je ne pouvais pas ne pas t’en parler en premier », lui écrit-il.

La jeune femme, cadre en informatique, est touchée par son intention et lui en fait part avant de lui demander plus de détails sur la nature de l’investissement et des revenus que cela pourrait lui générer.

« Il suffit de verser une somme et nos équipes feront le reste. On investit l’argent dans le financement des projets de nos clients. Plus la somme est grande, plus les bénéfices le seront, mais je te laisse la liberté de choisir la somme avec laquelle tu veux commencer », répond le jeune homme.

Samia lui répond qu’elle va réfléchir à sa proposition et qu’elle lui donnera sa réponse le lendemain. Cette nuit-là, elle ne dormira pas. L’idée lui semble bien alléchante, mais elle hésite à prendre le risque.

Au cours de ses dix années de travail, la jeune femme a fait quelques économies, qu’elle prévoyait pour s’acheter une voiture. L’idée de la doubler ne lui déplaît pas. Et puis, Jacem lui a promis de venir en Algérie et rencontrer ses parents, elle n’a pas de quoi douter de ses intentions…

Le lendemain, Samia décide d’accepter l’offre de l’homme d’affaires et, quelques heures plus tard, elle prend rendez-vous avec sa banque afin d’effectuer la transaction. Dans l’après-midi, la somme de 200.000 dinars est versée à un compte qu’il lui a indiqué.

Jacem ne lui confirme pas la réception de l’argent, mais elle ne s’en soucie pas, ils discuteront le soir venu. Mais à 22 h, il n’est toujours pas en ligne. Inquiète, la jeune femme décide de l’appeler, sans réponse.

Cela va durer deux semaines avant qu’elle ne se rende à l’évidence : il ne répondra plus. Elle décide toutefois de tout faire pour récupérer son argent.

Lorsqu’elle se rend chez la cellule de la police chargée des affaires liées à la cybercriminalité, les policiers l’informent qu’elle n’est pas la première victime et que ce schéma est très récurrent dans les plaintes qu’ils reçoivent quotidiennement.

Les policiers l’informent qu’ils vont tenter de retracer les conversations qu’elle a eues avec le suspect, mais que ce n’est pas gagné car aucun contrat ne les lient et qu’elle a envoyé l’argent de son plein gré…

Marketing : les dessous des offres alléchantes

07 h 30, le 04 janvier 2022. Amina*, 22 ans, se lève pour aller à l’université. Son premier réflexe, consulter son téléphone pour voir si elle a des notifications. La veille, elle avait posté une demande d’emploi sur un groupe Facebook.

Naturellement, les commentaires se sont succédé pendant la nuit. La plupart lui souhaitent bon courage et partagent avec elle son désespoir de trouver un boulot. Mais un en particulier attire son attention.

« Si vous êtes étudiant (e) ou vous cherchez un travail supplémentaire, on vous propose un travail depuis chez vous. Vous pourrez choisir vos horaires et faire des bénéfices allant jusqu’à 200 000 DA », porte le texte de l’annonce. La nature du travail et l’identité de l’employeur ne sont pas précisés.

L’offre d’emploi est alléchante. Amina est intriguée et elle se réjouit de pouvoir travailler avec cette société qui lui promet une flexibilité en adéquation avec son emploi du temps à l’université et, cerise sur le gâteau : un salaire dont on n’oserait même pas rêver étant étudiante.

La jeune femme n’y pense pas trop longtemps et envoie un message au porteur de l’annonce avant d’aller se préparer pour aller en cours. Elle ne prête pas attention aux trois personnes qui ont réagi avec « Haha » au commentaire, ni à la réponse d’un jeune homme : « Attention, c’est une arnaque ! »…

La réponse met quelques heures à arriver. L’annonceur se présente comme un intermédiaire qui ne saurait lui expliquer convenablement les missions du poste et lui demande son nom, prénom et numéro de téléphone afin de l’ajouter à un groupe WhatsApp où elle sera mieux orientée.

Amina se retrouve dans un groupe de 78 adhérents. Cela la surprend mais ne l’alerte pas plus que cela, les promesses du poste sont beaucoup trop tentantes.

Sur le chat, personne ne peut envoyer de messages à part le créateur du groupe. Celui-ci leur envoie un lien vers une conférence en ligne et leur demande de le rejoindre afin de leur expliquer les exigences du poste.

D’abord, il leur raconte qu’un jour, il était à leur place, novice ; mais que grâce à ce travail il a pu s’offrir un appartement, une voiture de luxe et peut se payer tout ce qu’il veut seulement trois ans après avoir commencé.

Après les éloges viennent les explications : « Tout ce que vous aurez à faire c’est d’acheter un produit que vous revendrez par la suite. En bonus, à chaque fois qu’une personne viendra rejoindre notre communauté de votre part, vous aurez une commission. Grâce à un système de points, celle-ci augmentera de plus en plus avec le temps ! »

Il agrémente avec des chiffres conséquents et bon nombre d’entre eux semblent avoir mordu à l’hameçon. Amina considère l’idée et se dit que ça ne doit pas être si difficile de rentabiliser son investissement.

Suite au discours convainquant du conférencier, l’étudiante décide de tenter l’aventure. Elle investit alors 20 000 DA, une somme qu’elle avait économisée de sa bourse d’étudiante sur deux ans.

Amina reçoit son produit, des compléments alimentaires, et les met à la vente. Contrairement à ce qui lui a été promis, la jeune étudiante est surprise de ne recevoir aucun engouement pour les compléments alimentaires de l’entreprise.

Son entourage, à qui elle a proposé de rejoindre l’entreprise afin d’amorcer la somme qu’elle a déboursée pour le produit invendable, ne semble pas emballé. Un terme revient à chaque fois : « le marketing pyramidal »…

Les ventes pyramidales : une escroquerie déguisée

Le marketing pyramidal est un système caractérisé par son aspect secret et la promesse de gains en argent. Son fonctionnement se base sur le recrutement de nouveaux membres, plus que sur une réelle activité commerciale.

Ainsi, une chaîne se crée. Les membres font entrer de nouveaux membres afin de rentabiliser leur premier investissement et faire des bénéfices, ceux qui sont en haut de la pyramide étant les plus avantagés.

Les plus naïfs, comme notre témoin, se laissent envoûter par les discours mielleux de ceux-ci, et finissent en bas de la pyramide.

Après s’être rendu compte de la supercherie, deux choix s’offrent à Amina : laisser tomber et apprendre de ses erreurs ou commencer à publier des annonces en commentaires Facebook…

Quand le désespoir mène à l’arnaque…

Il est 17 h lorsque Mohammed* clique sur envoyer. C’est le quinzième CV qu’il envoie de la journée. Cela fait déjà plus d’une année que le jeune diplômé en biologie cherche un poste d’emploi, sans succès.

Le jeune homme, malgré son master 2 en biologie et ses nombreux stages avérés, peine à décrocher le fameux premier emploi. Par manque d’expérience professionnelle, ou de chance, les rares fois où il a été appelé pour un entretien n’ont pas abouti.

Ce jour-là, Mohammed a envoyé sa candidature à un laboratoire d’analyses médicales, dont l’annonce a été publiée sur un site spécialisé. Il ferme son PC dans l’espoir que celui-ci lui donne une chance pour mettre en pratique ses compétences et commencer à gagner sa vie.

Il faut dire qu’être au chômage à 24 ans pèse sur le moral de beaucoup de jeunes. Ce sentiment d’être « en retard » grandit chaque jour un peu plus.

Le soir venu, le jeune diplômé consulte sa boîte mail sans trop d’espoir. À sa grande surprise, il y trouve une réponse du laboratoire. Heure d’envoi : 17 h 02.

 

Une entreprise qui exige des frais de traitement de dossier, il n’en a encore jamais rencontré, encore moins des gens qui recrutent sans entretien d’embauche. Mohammed est sceptique, mais l’attrait du poste prend le dessus et il envoie une réponse.

À sa demande d’éclaircissement concernant les frais qu’il doit payer, le laboratoire lui répond qu’une partie de l’argent servira à l’achat d’une tenue de travail, tandis que l’autre couvre le traitement du dossier par un cabinet de recrutement.

Le jeune homme semble convaincu par les explications de l’entreprise et décide d’emprunter la somme requise afin d’enclencher la procédure de recrutement.

Le lendemain, un bon ami lui prête 7000 DA. Le jeune homme ne s’inquiète pas trop, il se dit qu’il pourra le rembourser à la fin du mois et il s’empresse de passer à la Poste afin de verser la somme due au laboratoire médical.

Une semaine s’est écoulée depuis son passage à Algérie Poste. Depuis, Mohammed n’a reçu aucun écho de la part de l’entreprise. Il leur a pourtant écrit pour les informer qu’il a bien envoyé l’argent, reçu de versement à l’appui.

Bien que longue, le jeune homme ne s’alerte pas tout de suite et décide de les relancer. Après tout, ces procédures peuvent parfois prendre du temps.

Mais surprise : son mail ne passe pas. L’adresse entrée n’existe plus. Mohammed tente de retrouver l’annonce afin de vérifier le mail de l’entreprise, sans succès.

Il a pour réflexe tardif de chercher le nom du laboratoire sur Google, encore une fois en vain. Ni le nom ni l’adresse fournis sur l’annonce ne sont réels.

Après la désillusion, le jeune homme se rend compte de la supercherie. Il coupe définitivement tout espoir de retrouver la société ou son argent. Il allume son ordinateur, ouvre son compte Facebook sur le groupe « Emploi Dz » et commence à taper : « Attention, arnaque… ».

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* Tous les prénoms figurant dans l’article ont été changés pour préserver l’anonymat des témoins.

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