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Soins à l’étranger : la double peine infligée aux malades algériens

Soins à l’étranger : la double peine infligée aux malades algériens

La problématique de l’accès des citoyens algériens aux soins de qualité revient au centre des débats après l’appel lancé pour la prise en charge d’un artiste connu, atteint d’une maladie grave qui nécessite son transfert dans un centre spécialisé à l’étranger.

L’artiste en question c’est le comédien Salah Ougrout. L’appel est très vite entendu, faisant réagir en premier lieu le ministre de la santé, Abderrahmane Benbouzid. Celui-ci a promis une prise en charge rapide de l’humoriste qui a été transféré ce samedi en France.

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Le cas de Souilah, comme l’appellent ses fans, rappelle la double peine qui est infligée aux malades Algériens, pris au piège entre un système de santé défaillant, nécessitant une réforme en profondeur, et des frontières fermées.

Avant la pandémie de Covid-19 et les restrictions sur les voyages qui en ont découlé, au moins deux franges de citoyens pouvaient se soigner dans les hôpitaux étrangers : ceux qui bénéficiaient d’une prise en charge, parfois grâce à l’intervention et ceux qui ont les moyens de se payer le voyage, le séjour et les soins.

Beaucoup avait été dit à propos du système des prises en charge à l’étranger, à savoir qu’il ne profitait pas toujours à ceux qui nécessitent réellement un transfert, mais aux hauts responsables de l’Etat et à tous ceux qui ont le bras long.

Mais toujours est-il que beaucoup d’Algériens se soignaient dans les hôpitaux turcs, français, tunisiens et autres, avec leurs propres moyens ou ceux de l’Etat.

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Ce qui est devenu presque inaccessible avec la fermeture des frontières et la suspension des liaisons aériennes. Il ne suffit plus d’être dans un état grave, d’avoir des connaissances haut placées où de disposer des sommes nécessaires pour se faire transférer.

Il faut surtout obtenir l’autorisation de sortie du territoire national. Le cas du jeune Hamza, de la commune de Feraoun (Béjaïa) est édifiant à ce sujet. Atteint de plusieurs maladies (cœur, reins, AVC), les citoyens de sa localité ont fait le nécessaire pour collecter la somme qu’il faut pour son voyage, son séjour et son opération en France.

Mais ils ont buté sur la fameuse autorisation de sortie que délivre le ministère de l’Intérieur. « Nous voulons faire pression pour accélérer la procédure. Nous ne demandons ni argent ni prise en charge, juste une signature », avait indiqué un citoyen lors d’un sit-in observé le 21 avril devant le siège de la wilaya de Béjaïa.

 « Nous aussi, on a besoin de se soigner »

Un autre cas, toujours à Béjaïa. Un citoyen, du nom de Aït Keddache Ouali, a pris attache avec la rédaction de TSA pour faire connaitre son calvaire. Sa femme est atteinte d’une cirrhose au stade qui nécessite une transplantation. L’opération devra se faire en Turquie.

La famille a tout réglé concernant les frais d’hospitalisation et de séjour, et prévu un avion privé pour le transport de la malade et de ses accompagnateurs.

Elle a sollicité une autorisation de sortie du territoire national auprès du ministère de l’Intérieur et elle l’a obtenue jeudi. La malade a pu partir le même jour en Turquie.

Devant la fermeture des frontière qui perdure, beaucoup de personnalités connues n’hésitent plus à solliciter l’intervention des autorités, même se cela risque parfois d’être mal vu par les citoyens lambda.

En octobre dernier, un ancien joueur professionnel de football, du nom de Samir Hadjaoui, a multiplié les appels sur les réseaux sociaux jusqu’à ce que le ministère de la Jeunesse et des Sport intervienne pour lui obtenir une prise en charge à l’étranger et une autorisation de sortie.

Il arrive aussi que les autorités répondent aux sollicitations de citoyens ordinaires. En février dernier, une jeune fille a pris son courage à deux mains et réalisé une vidéo dans laquelle elle expose le cas de sa mère gravement malade et nécessitant des soins à l’étranger.

« Nous n’avons pas les moyens d’aller à l’étranger, surtout que tout est fermé. Mais même avant, on lui refusait le visa, on lui demandait de payer la totalité des soins. L’opération à l’étranger coûte trois fois plus cher qu’en Algérie. Je ne demande pas de l’argent. Je demande au président de la République de nous donner ce droit de se soigner. Avant d’être président, vous êtes un être humain. Vous êtes parti pour vous soigner, que Dieu vous guérisse, mais nous aussi on a besoin de se soigner », avait-elle dit à l’adresse du chef de l’Etat.

Le soir même elle met en ligne une autre vidéo dans laquelle elle annonce, toute rayonnante, que le président en personne a appelé la famille et promis de prendre en charge la malade. L’histoire s’est bien terminé pour celle famille, mais, hélas, ce n’est pas le cas pour tout le monde.

Les Algériens, qui ont perdu confiance dans leur système de santé, n’hésitent plus à solliciter les hautes autorités du pays pour demander et parfois obtenir une prise en charge médicale à l’étranger.

Mais la réponse n’est toujours pas positive, ce qui rend urgent une réforme profonde du système national de santé. L’Algérie dispose de médecins bien formés pour soigner convenablement sa population, et les soins à l’étranger devaient être réservés à des cas bien précis.

« Nous sommes le seul pays du monde qui exporte des malades… mais aussi des médecins », a déploré le Pr Kamel Bouzid, dans un entretien à TSA publié début mars.

Outre les hôpitaux publics, l’Algérie dispose de cliniques privées de qualité qui offrent des prestations de qualité, mais fortement onéreuses et non remboursables par la Sécurité sociale, ni prises en charge par des mutuelles privées. Ce qui est une anomalie.

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